#Writever 2024-09

1 – Travailler

Au début était le labeur… L’Humain étant apparu sur une planète jusque là entièrement dévolue à la Nature, il lui est rapidement devenu évident que, si les baies poussaient dans les buissons, pour le reste, le made in China mettrait encore quelques bons millénaires à apparaître. Il s’agissait donc, au fil des évolutions, d’accumuler soi-même du savoir-faire et des capacités d’adaptation, et se soumettre au supplice qu’on appellera bien plus tard le travail. Le lot commun, incontournable de chacun était donc de travailler. Soudain, une grotte ! Et, habitant dans cette grotte obscure, afin de se protéger de l’extérieur où grouillent plein de … Non, en fait, on ne veut pas savoir quoi. Dans cette grotte donc, suivons les péripéties de Rrrrauu-Baihhrrrr, brave représentant de la génération des Néandertaliens. Son recoin, au fond de la grotte douce grotte, est rudimentaire, mais néanmoins coquet, surtout depuis le passage de Val’ri DhaMiii’dau, grande prêtresse de la tribu de la petite vallée qui monte, les EhmmCyssse. Elle avait notamment eu recours à la prière au dieu MâââRhouffflll’ , afin de parvenir au résultat demandé.

Affamé, à en croire les incantations émises par son ventre, Rrrrauu-Baihhrrrr sort de sa grotte à offrande modérée, et part cueillir de quoi subsister jusqu’à demain.

2 – Exploitation

Des siècles et des siècles avaient passé, et Jehan, serf de son état, aurait été bien incapable de retrouver la grotte de son ancêtre Rrrrauu-Baihhrrrr. En ces temps modernes, on commence à maîtriser l’exploitation des animaux d’élevage et des trésors de la Nature. Lait, œufs, céréales, viandes diverses, fruits et légumes, tout cela résulte du labeur de Jehan et ses compagnons. Alors pour quelle raison tous ces travailleurs de la terre ont-ils encore et toujours envie de se rebeller, année après année ? Ç’est du à la portion congrue qu’on leur accorde sur tout cela, quand le seigneur local garde pour lui et les siens les meilleurs morceaux, et s’enrichit encore et toujours dans le commerce du reste. Le soir tard, à la faible lueur d’une chandelle de fortune, Jehan et les autres se réunissent secrètement pour parler de tout cela. La colère gronde.

3 – Collectif

Parfois, au cours de ces soirées de discutions nocturnes, une mauvaise pisse d’âne faisant office de vin aidant, un serf explosait en fureur, mêlant larmes de désespoir face à la faim qui tenaillait les malheureux habitants de sa chaumière, et colère contre ce système féodal qui décide de ta vie jusqu’à ta mort. On apprenait souvent quelques jours plus tard qu’il s’était fait occire pour avoir osé insulter un sbire du seigneur local. Pour Jehan, c’est évident, toute tentative individuelle, ou limitée à une poignée de pauvres gars, est vouée à l’échec. La solution ne peut passer que par le collectif.

4 – Domestique

Jehan et ses compagnons de misère ont décidé de se soulever et faire un sort à ce seigneur qui avait droit de vie et de mort, soit par voie d’armes sur simple présomption, soit indirectement en congédiant séance tenante un serf et sa famille, les expulsant du taudis insalubre faisant office de chaumière. C’en était trop. Nul n’est dupe, même en cas de succès, celui-ci ne serait que temporaire, et la répression serait impitoyable. Mais ce que Jehan et ses futurs révoltés visaient, c’était de créer un précédent, un fait qui serait connu car colporté sous le manteau, de village en village. L’esprit de révolte se propagerait. Avant tout, il faut des informations sur les faits et gestes de la bande de fripouilles qui vit dans le château. Qui, quoi, combien, quand … Tout renseignement serait bon à prendre. Comment obtenir ces renseignements ? Jehan a appris que Lancelin,un domestique en service au château, atteignant bientôt l’âge vénérable de 47 ans, est devenu trop lent, trop maladroit, trop faible pour remplir sa tâche. D’une manière ou d’une autre, sa place va se libérer. Jehan s’est présenté sur proposition de Lancelin à ses maîtres, pour appuyer la démarche du remplaçant. Jehan est robuste, adroit de ses mains, et sait se rendre utile en maintes occasions. Le seigneur s’est prononcé : Jehan commencera le premier dimanche d’avril. C’est dit. Ou avant, si Lancelin rejoint ses ancêtres avant cette date.

5 – Sale boulot

Une fois entré au service du seigneur du château, Jehan se fait oublier autant qu’il le peut. Il s’agit de devenir couleur muraille, muraille de château bien entendu. Il rend des services à toutes et tous en faisant tout le sale boulot sans rechigner, au profit de ses maîtres ou des autres serviteurs. Il gagne la confiance progressivement, et ne tarde pas à engranger ainsi des informations, et les partage plus tard avec les autres « conspirateurs » lors de rencontres secrètes. Petit à petit, ils commencent à avoir une analyse assez fiable de la situation. Horaires des tours de garde, la nuit. Quantité d’hommes d’armes et matériel.

Dans quelques semaines auront lieu de grandes festivités annuelles, sous les remparts de la plus grande citadelle du comté. Quelques dignitaires du Clergé viendront assister à ces joutes. La plupart des hommes d’armes partiront s’affronter là-bas pour leur renommée, et, derrière, celle de leurs maîtres.Pour Jehan, il s’agit là d’une occasion idéale. Les adversaires les plus dangereux se seront éloignés, affaiblissant d’autant le maintien de l’ordre local. Mais le seigneur n’en a cure, et n’a de cesse de parler de ces joutes durant lesquelles il se mesurera à d’autres seigneurs voisins, par guerriers interposés. Et de toute façon, les moissons seront la garantie de tranquillité, la fatigue privant les gueux de toute velléité de soulèvement. Discrètement, Jehan éloigne sa femme et ses enfants, prétextant un parent proche fort malade. En réalité, ils iront se réfugier à l’abri des évènements. Les rebelles ont bien essayés d’inciter le bas peuples des villages importants de la région pour coordonner les opérations. Mais ils n’ont aucun moyen de savoir quand et comment d’autres soulèvements se produiront, si seulement ils se produisent. Jehan lâche prise et se rassemble sur son propre cas. Les autres villages ? On verra bien. Il faut que ça change.

Le grand jour approche...

6 – Embaucher

Le matin tant attendu est arrivé. Les armes, la plupart de fortune, sous sorties des meules de foin, des tas de paille, des caches en forêt. Les cohortes paysannes se forment, et fondent sur le château du seigneur. Pourquoi ce jour en particulier ? Pour dissimuler les déplacements de ces rassemblements. En effet, aujourd’hui débute la grande foire où viennent de nombreux marchands, souvent de très loin, dans l’espoir de vendre qui un meuble, qui quelques têtes de bétail, qui des vêtements superbes pour dignitaires vaniteux. Ainsi, de nombreux attroupements convergent vers la place de marché. Bien malin celui qui repérera les rebelles dans ces foules.

Jehan et ses compagnons passent ainsi le pont-levis et pénètrent dans Sitôt présents dans la grand cour. Ils sont cinquante environ, quand la garde doit se contenter d’une dizaine de gardes. Jehan est confiant, la victoire est possible. Un grand cri se fait entendre, et les rebelles sortent leurs armes de sous la cape ou du sac, et tous convergent vers la maison forte, aux murs épais, bâtie sur une butte afin de dominer la place. C’était attendu, les portes épaisses se referment bien vite, après que les défenseurs se soient réfugiés à l’intérieur. Qu’importe, torches et brûlots ne tarderont pas à bouter le feu à ces portes de bois. La fumée débusquera les assiégés avant la tombée de la nuit, c’est certain…

Soudain, un bruit métallique grinçant, violent, retentit derrière les rebelles. Quelques gardes du seigneur, sans doute bien cachés sous quelque tenue de simple marchands ou badauds, ont actionné le mécanisme des chaînes, et les lourdes grilles se sont refermées. Jehan se retourne et observe la situation sans comprendre. Mais tout s’éclaire quand quelques dizaines de forains tombent à leur tour leur oripeaux, révélant des tenues de combattants, des masses d’armes, des lances, des épées, de longues dagues… Jehan ne saura jamais qui a trahi, mais la sinistre évidence est flagrante. Il est évident que leur fin est proche. Le seigneur, averti bien à l’avance, n’a eu qu’à embaucher des mercenaires. Le sang va couler en masse, et la triste nouvelle sera diffusée dans toutes les contrées pour tuer dans l’œuf toute velléité de rébellion, ici ou ailleurs. À la sortie de l’hiver prochain, il s’agira de faire venir quelques dizaines de miséreux, trop heureux de se voir confier ces chaumières vidées, et la vie des malheureux disparus.

7 – Hiérarchisé

Au fil du temps, la population du royaume va croître. Il va devenir assez rapidement évident que le rapport numérique pourrait s’avérer être un danger potentiel pour les puissants, les gens de pouvoir. Ils vont donc affiner, développer toute une organisation, un système comme on le dira plus tard, permettant de repérer dès que possible tout mouvement séditieux, toute idée trop libertaire, tout esprit trop apte à galvaniser les foules. Pour fonctionner de manière la plus optimale possible, l’organisation doit être claire et efficace. L’information issue du terrain doit remonter le mieux et le plus vite possible aux décideurs, et les décisions résultantes doivent redescendre sans perte et sans retard également. C’est ainsi que se fortifie un ensemble hiérarchisé, qui va jusqu’à intégrer la surveillance à chaque étage de la loyauté et le zèle des subordonnés directs, sous peine de sanctions très souvent … définitives.

8 – Invisible

Une fabrique n’est-elle pas un royaume en microcosme ?

Le roi peut octroyer des privilèges à certains, et bien des contraintes sur les autres. De même pour le patron. Le roi pourra même faire emprisonner, voire faire exécuter qui lui déplaît. De même, le patron pourra décider de sanctionner ou renvoyer dans la seconde celle ou celui qui, perdant son travail dans un univers sans protection sociale, tombe rapidement dans la misère si une nouvelle place n’est pas trouvée.

La transposition entre ces deux univers est loin d’être invisible.

9 – Usine

Jacques a 7 ans, et n’a pas la vie heureuse, à l’instar de Jehan, son très lointain ancêtre dont il n’aura jamais connaissance, pour la triste raison que Jacques est orphelin. Il vit dans ce refuge avec quelques dizaines d’autres enfants de la rue, enfants abandonnés et sans doute voués à un avenir tout aussi sombre et difficile que leur jeune passé.

Certaines pièces du bâtiment exhalent encore, parfois, une odeur forte de savon. Quelques années auparavant, Marie de Medicis avait fait transformer cette grande savonnerie en un orphelinat. Question relents et labeur, il en sera de même dans le futur avec les usines : l’odeur de graisse de machine sera omniprésente, étouffante, imprégnée jusqu’au cœur des fibres des tenues de travail que les ouvriers rapporteront chez eux, ce qui permettra de ne jamais oublier vraiment la main mise des patrons sur leurs vies.

10 – Intensification

Sur le plan international, les temps sont déjà à la foire d’empoigne pour s’imposer. Les guerres sont nombreuses, se déroulent sur terre comme sur mer, et font appel aux derniers armements pour prendre le dessus. Cette intensification des conflits entraîne une montée des besoins en armement, tenues, intendance, logistique, constructions etc … Toujours plus de production, toujours plus d’argent, toujours plus de cupidité. L’humain est une matière première, juste une matière première. Abondante et peu coûteuse.

11 – Bullshit

Pendant quelques temps, Jacques travaille dans une auberge dont le patron est de connivence avec le directeur de l’orphelinat. Présenté comme une promesse de travail certes temporaire (quelques mois), mais facile, au soleil du midi, au milieu du chant des cigales, cette filière fournit une main d’œuvre corvéable à merci, bernée par la promesse, répétée à intervalles réguliers, d’une place définitive dans l’auberge pour celui qui se montrerait « le meilleur ». Quant au salaire, il est vraiment symbolique, car une grosse partie de celui-ci passe directement de l’aubergiste au directeur de l’orphelinat, en remerciement. Jacques n’a que 14 ans mais est déjà attentif et malin. De temps en temps, il rencontre les domestiques de quelque noble anglais en cure solaire dans la région. Ça discute dans la grange, le soir tard, après le service. Une fois, Jacques tombe sur William, un jeune palefrenier parlant un français assez correct. Jacques lui fait part de ses doutes sur les promesses d’engagement par l’aubergiste. En effet, cela fait des années que les petits orphelins se succèdent, mais jamais aucun n’a été retenu. Jacques dit à William : _  C’est un jeu de dupes ! _ Qu’est-ce que c’est, djeu de diupes ? _ On te promet quelque chose en sachant très bien que ça n’arrivera pas. Mais on le fait quand même pour profiter de toi. _ Ah ! Djeu vouaa. Cheu nous, on’dit : bullshit !

12 – Micro-tâche

Jacques en a marre de travailler pour cet aubergiste esclavagiste. Il envisage de tenter sa chance à la fabrique de tapis qu’est devenu entre-temps l’orphelinat. Le travail y est également épuisant, mais il n’a pas à tremper dans le lisier et la boue jusqu’aux genoux pour nettoyer la grange de l’auberge, puis passer au crottin de cheval de l’écurie pour prendre soin des chevaux des clients un peu fortunés. Il se sent sale jusqu’au plus profond de son être. Dans le futur, ses descendants se régaleront des séries télévisées Les Experts ( de Miami ou d’ailleurs), où l’on voit à longueur d’épisodes des gens en blouse blanche immaculée traquer la micro-tâche avec des cotons-tiges, modèle pour éléphant. Le pire de tout cela est qu’il coûte à l’aubergiste de belles promesses d’engagement à long terme, des avantages en nature, terme ronflant pour désigner le fait d’être nourri avec les restes, parfois recrachés, que les clients abandonnent en fin de repas, et enfin peu, très peu d’argent sonnant et trébuchant. C’est décidé, demain il donnera son congé définitif.

13 – Entrepreneur

Jacques travaille sur son métier à tisser du matin au soir. Le bruit finit par abrutir, envahir le corps et l’esprit de Jacques. Il enchaîne les gestes presque automatiquement. Il y a un grand nombre de machines dans cette grande salle. Quand il débauche, il est vraiment épuisé, et il n’est plus en mesure de réfléchir posément à comment changer sa vie. Idéalement, il sent bien qu’il faudrait qu’il se lance et vole de ses propres ailes. Mais devenir entrepreneur nécessite argent et relations dans le monde des affaires. Et bien souvent, ce monde vous met des bâtons dans les roues juste pour vous punir d’avoir eu l’outrecuidance d’imaginer que vous pouviez quitter ce monde grouillant et détestable qu’est le bas peuple, pour vous élever socialement. Les gueux doivent rester des gueux. Alors Jacques se résigne, et cela d’autant plus facilement qu’il n’a pas assez d’argent pour s’établir. Pas même une échoppe modeste. Il ne fait que survivre, comme tous ses congénères d’infortune.

14 – Rémunérer

Il est assez facile d’imaginer que de tous temps, il y a eu des patrons qui choisissaient de rémunérer leurs employés au minimum. Même à l’époque actuelle où il existe pourtant une certaine forme de droit du travail, certes bien mis à mal ces dernières années , les affaires d’abus sont fréquentes et concernent régulièrement des entreprises qui font pourtant des bénéfices très confortables voire pharaoniques. Il s’agit alors bien de phénomènes extrêmes de cupidité, où l’on piétine sans vergogne la vie de celles et ceux qui pourtant créent cette richesse. On apprend cependant, mais très rarement, que des grandes sociétés font preuve de générosité envers leurs salariés. Ainsi, IKEA a gratifié en 2019 les 3000 salariés de Norvège d’environ 4000 euros. Porsche a même distribué presque 10000 euros à chaque employé(e) certaines années. S’agit-il de réelle volonté de partager un peu de richesse, ou bien s’agit-il de publicité institutionnelle à moindre frais, relayée gratuitement par de nombreux médias à travers le monde ?

15 – Prolétaire

Il ne faut pas généraliser, il ne suffit pas d’être patron pour mépriser ses employés. Certains traitent les salariés avec un assez grand respect, et jouent le jeu d’une relative transparence. Bon, il faut cependant reconnaître qu’il ne sont pas légions. Pour citer Michel Audiard : « Il existe des patrons de gauche, je tiens à vous l'apprendre ! Il existe aussi des poissons volants, mais ils ne constituent pas la majorité du genre !

À l’autre extrémité du spectre, on trouve un petit monde bien abject, considérant les employés comme des objets, un « mal nécessaire » pour se rapprocher d’encore plus de richesses. L’argent et le pouvoir sont les seules valeurs. Ils essaient de se dédouaner derrière une philosophie qu’ils appliquent avec force, et qui est très bien illustrée par une célèbre réplique d’une scène culte du film « Le Bon, la Brute et le Truand » : ça commence avec « Le monde se divise en deux catégories... », et ça finit par « Toi ? Tu creuses ! » Mais tous ces « capitaines d’industrie », ces « héros du capitalisme » sont des drogués du fric et du pouvoir, des malades mentaux auto-satisfaits. On peut y ajouter, issus de celles et ceux qui ont eu la chance de naître dans un milieu aisé, très aisé, la fraction qui relègue la notion de travail au rang d’indignité, ne se préoccupant que de faire fructifier leur trésor et leur nom « illustre » au lieu de mettre leur pouvoir au service des plus nécessiteux. Ces « gens d’en haut » semblent avoir oublié qu’ils ont été jadis des « gens d’en bas », des prolétaires eux-aussi, eux ou leur parents, ou grands-parents.

Jusqu’à preuve du contraire, il n’est jamais rien sorti de la cuisse de Jupiter.

16 – Automatiser

Comme l’argent est leur seule priorité, les patrons doivent optimiser le bénéfice, par tous les moyens. On voit ainsi au fil des siècles apparaître des « conseils ». des experts en optimisations diverses. Ils partagent, moyennant finances, bien entendu vu que c’est la finalité du sujet, leurs astuces, savoir-faire, bonnes adresses. On va d’abord apprendre à faire croire au client visé que le produit est la réponse à son besoin. Et si il n’a pas ce besoin, c’est qu’il ne sait pas encore qu’il a ce besoin, mais pas d’inquiétude, après une campagne de gavage de cerveau livrée par les médias perfides et bien rémunérés, et la publicité omniprésente, ce sera réglé. Pour produire, il s’agira d’utiliser ce qui coûte le moins en faisant croire le contraire. Il faudra aussi limiter les erreurs de fabrication, tout en mettant le moins de temps possible. Les machines, puis plus tard, les robots seront la solution incontournable. Automatiser et remplacer l’homme par de la technologie. L’homme, dans le fond, on en a besoin pour acheter. Pour le reste, on cherche au maximum à s’en passer.

17 – Bureau

Le bureau peut parfois être un marqueur de réussite. À la base, il sert de lieu de travail à une ou plusieurs personnes, et délimite l’espace alloué à une vocation précise. Bureau de la comptabilité, bureau des RH (ou bureau du personnel en ancien français), bureau du service informatique, bureau de … Mais quand on a son nom sur la porte, sur son bureau, la photo avec quelques supérieurs hiérarchiques, voire, Graal suprême, la photo avec le big shot lui même, sur le mur derrière soi, ostensiblement destiné à impressionner le visiteur de passage et le persuader de son importance dans l’organigramme, on a déjà atteint une sphère supérieure et on s’est émancipé de la fange des anonymes qui triment dans la soute. Au dessus de ce niveau déjà apprécié, on trouve le classement dans les étages. Plus on monte, et plus c’est glam’. On peut d’ailleurs sourire en pensant au des  IT Crowd, Moss, Roy et Jen, au sous-sol. Enfin, à étage égal, la vue offerte est l’indice qui fera la différence On note toutefois que, après avoir trimé et/ou magouillé pour parvenir à ce bureau élevé, la personne tournera le dos à ladite vue enchanteresse pour travailler, dans le but d’afficher un évident renoncement aux plaisirs immédiats, symbolisant le sacrifice total à la réussite de « la boite ».

18 – Chômage

Du (très très vieux) temps de tonton Rrrrauu-Baihhrrrr, subvenir à ses besoins signifiait partir chasser ou cueillir avec les autres. On rentrait avec nourriture et de quoi fabriquer vêtements. Pas de commerce pour y couper. (Certes, on pouvait aussi ne pas rentrer si on avait fait soi même office de nourriture à une autre créature). À partir du moment où le feu fut maîtrisé, se chauffer revenait à aller chercher du bois dans la forêt la plus proche. Pas de factures de carburants, de fuel, d’électricité ou de gaz. Les temps ont changé. Les choses s’achetant, il faut de l’argent. Et pour avoir de l’argent, quand on n’a rien d’autre à vendre, on vend sa force de travail. Mais quand on ne trouve pas de place, on n’a pas de salaire. Dans certaines parties du monde, cela correspond à une déchéance assez rapide. Nous avons la chance d’avoir dans notre pays une prise en charge du chômage.