Hunedoara
Nous quittons cette bonne ville de Timisoara avec l'objectif d'aller enfin voir les Carpathes et ne pouvons pas ne pas nous arrêter sur la route à Hunedoara où se trouve le plus grand château de Roumanie, le château des Corvin (rien à voir avec des corbeaux, c'est le nom de la famille qui l'a fait construire).
En quittant la ville après avoir mangé comme si nous nous apprêtions à traverser un désert (haa, les joies du petit déjeuner international des hôtels), nous sommes toujours dans la pleine de la peur mentionnée dans un précédent épisode et petit à petit nous voyons surgir les montagnes majestueuses des Carpathes au loin. Heu en réalité vu d'ici elles ressemblent plutôt à des collines mais comme elle s'élèvent d'un coup de la plaine ça fait quand même un bel effet, dont le moindre n'est pas de nous donner une perspective.
On ne roule pas très longtemps et un peu avant notre destination du jour, que voit-on, sur le bord de cette gigantesque zone industrialo-commerciale ? UN DECATHLON ! Incroyable, notre sang ne fait qu'on tour et nous nous arrêtons instantanément pour nous précipiter ventre à terre dans ce temple de la consommation. En effet il fait toujours 33° à midi et il y a quelques jours nos voisins hollandais du camping hollandais nous ont donné pas mal envie de disposer nous aussi d'une toile de protection anti-soleil. Si c'est comme au Monténégro ici, chaque propriétaire de camping aura minutieusement éradiqué toute plante de plus de 10 cm de haut et nous cuirons au soleil, autant prendre les devants.
Nous devenons donc les heureux propriétaires d'un machin supplémentaire à stocker et transporter partout avec nous. Et emportés par notre élan nous achetons deux fauteuils pliants parce que glander au camping nécessite un minimum de confort, nos essais dans le magasin sont fructueux et tout ce qui manque à ces petites chaises est de disposer de porte-cannettes intégrés, tant pis il faudra poser les cannettes par terre c'est d'ailleurs précisément dans cette position que j'écris ces lignes (pendant qu'un autre fanatique de tondeuse dérange notre quiétude en rasant l'herbe qui n'avait rien demandé à personne, rha ça doit faire 45 minutes que le tracteur-tondeuse tourne autour de nous je suis à deux doigts du meurtre) notre bonheur est désormais total nous nous sentons enfin prêts à affronter les rigueurs de l'été, d'ailleurs que serait un véhicule de vacances sans toute sa panoplie de merdouilles Decathlon, hmm ? je vous le demande.
Et pour que cette expédition au centre commercial porte tous ses fruits, nous faisons aussi un détour par le Carrefour tout aussi géant (je ne sais plus quand j'ai visité un centre commercial aussi gros) qui se trouve juste à côté, participant ainsi depuis Bucarest au rayonnement international du Génie Français.
Bref, après cet interlude nous entrons dans la ville industrielle d'Honedoara où serpentent des tuyaux géants d'hydrocarbures et au centre duquel est logé le fameux château. C'est trop marrant les planificateurs n'en n'avaient rien à carrer du château en question et si côté pile on a la vue présentée ci-dessus, côté face, c'est-à-dire en se retournant, on a la vue suivante :
Et entre les deux un vilain parking (15 leu pour stationner, oui nous sommes en Europe mais pas dans la zone euro -ni d'ailleurs dans la zone Schengen ce qui n'a rien à voir dans ce paragraphe je m'entraine à faire des incises dans des parenthèses- du coup il faut payer dans une autre monnaie. Figurez-vous en passant que les frais de retrait sont exorbitants, 14% de commission nom de dieu je crois que c'est encore pire de se faire arnaquer par une institution plutôt que par un individu alors que -contrairement à tous les usages- les officines louches de change sont beaucoup plus honnêtes et sous l'impulsion de Valérie nous avons déjà échangé les euros dont nous disposons pour les lei, pardon des leu au pluriel, afin d'avoir encore plus de liquide à tel point que mon portefeuille s'en retrouve tout déformé et que je regrette de ne pas disposer de ma pince à billets, accessoire toujours utile dans les pays où on se retrouve facilement avec des dizaines de biffetons dans les poches : typiquement ici il existe des billets de 1 lei qui valent donc la somme royale de 20 centimes) et une rue défoncée par les travaux. Si le bâtiment en brique abandonné a un certain charme, le silo géant en béton n'a même pas l'excuse du brutalisme.
Je suis obligé d'avouer que la visite du château lui-même est bien décevante, et ce pour plusieurs raisons. D'abord ils en font des tonnes sur la torture en Transylvanie avec des mannequins présentés dans des appareils mais bon les mannequins ne ressemblent à rien tout ceci ne ferait pas peur à ma nièce de 5 ans. Ensuite les cartels explicatifs sont vraiment pauvres on n'apprend rien, puis les salles sont vides et un château vide... bon. Le tout laisse un curieux sentiment d'incomplétude que je ne comprends qu'à la fin de la visite : si tout a été restauré de manière à avoir l'air presque neuf, la restauration s'étale depuis la fin du XIX° (!!) avec des initiatives hardies et malheureuses, du genre “déposons donc toutes ces sculptures et bas-reliefs pour les remplacer par du crépi” (ils en ont gardé certaines pour les foutre au sous-sol). Du coup le château ressemble plus à un château playmobil qu'autre chose. Dans une des cours on voit un peu à quoi ça ressemblait peut-être : des gargouilles, des balcons ornés, des tuiles vernissées et des parois peintes de motifs géométriques.
En plus ils ont fait développer une application mobile pour assister la visite, elle réclame beaucoup trop de ressources qu'on aurait mieux fait d'investir dans des cartels et un service de traduction, plante tout le temps et quand elle se lance, n'explique rien. Bon. C'était un grand château et on l'a visité maintenant nous repartons vers les montagnes et voyons au passage sur le bord du chemin plusieurs maisons qui nous laissent totalement perplexes, du genre de celle-ci je n'ose pas m'arrêter pour les mitrailler pourtant ce n'est pas l'envie qui manque :
Jusqu'à ce que Félix nous donne le fin mot de l'histoire avec cette explication sur les palais gitans d'ailleurs nous en verrons un paquet d'autres au cours de nos pérégrinations.