Zarnesti

Nous voilà donc à Zarnesti, localité sans grâce qui s'étale dans la plaine au pied de reliefs monstrueux, en fait je sais pourquoi les roumains disposent d'autant de parcs naturels : tous les espaces inutilisables autrement sont des parcs naturels et voilà comme disent les anglais !

Piatra Craiului est donc une arrête rocheuse qui sort du sol d'un coup, monte de 1700m et s'étale sur 25 km ; dans le parc qui l'englobe on trouve pas loin d'un tiers des espèces endémiques de Roumanie, seulement une vingtaine d'ours et des sentiers de randonnée. C'est donc une zone prisée des touristes, en plus nous sommes dans la zone des Carpates compatible Dracula, avec des châteaux et des points de vue.

camping

Voici la vue sur la montagne depuis le camping, je vous épargne la vue du camping proprement dit, c'est-à-dire ce qu'on voit au niveau de la maison.

C'est semble-t-il un endroit prisé des roumains eux-mêmes pour venir se balader et résider au camping, celui où nous sommes est très vaste et de moitié plein qu'il était à notre arrivée, il s'est totalement rempli au début du weekend. C'est trop marrant de constater les comportements des gens au camping, d'ailleurs j'ai vu passer un article sur la modification de l'usage des campings en France, qui font de plus en plus de locatif, c'est-à-dire qu'une part désormais considérable des espaces est constituée de mobilhomes qui coûtent la peau des fesses en location, parce que 1. les clients ne veulent plus se péter le dos en dormant par terre, ni même utiliser une cuisine commune ils réclament le confort moderne et 2. les tenanciers rentabilisent à mort leurs locations (j'ai en tête des rendements de l'ordre de 30% mais il faudrait vérifier Valérie va encore m'accuser de grossir éhontément le trait voire d'affabuler complètement ceci dit j'ai la flemme de rechercher la source et je vous laisse dans l'expectative), en conséquence de quoi les campings sont de plus en plus souvent des franchises appartenant à des groupes qui concurrenceront sûrement bientôt AirBnb tandis que les autres ferment à la pelle.

Haa c'est bien fini le temps du camping associatif, du partage et de la tente posée devant un feu de camp, bientôt (enfin c'est déjà le cas dans un nombre de grandissant de campings) on ne pourra même plus louer un carré d'herbe heureusement le bivouac est encore toléré (mais son interdiction est sûrement pour bientôt, il est temps de mettre tous ces gauchistes et tous ces pauvres au pas de la nouvelle économie).

tentes

C'est bien fini mais pas en Roumanie heureusement (enfin sauf peut-être pour le modèle associatif), où les tentes font encore florès, alors c'est sûr pas les tentes des années 60, hein, plutôt les modèles familiaux où l'on peut tenir une réception de l'ambassadeur. Les feux de bois sont aussi légion, vu que l'utilisation de 30 kg de bois pour cuire des saucisses ne gêne personne. Et comme on était le we, à Zarnesti le tout était sillonné de gamins courant partout en vociférant, ce qui est un peu agaçant mais au fond bien sympathique.

Des tentes donc, agrémentées de quelques camping-cars et vans, mais surtout d'énormément de tentes de toit, du genre qui se déplie pour offrir un espace de 10m2 depuis... le toit comme son nom l'indique. Et là je regrette de n'avoir eu la présence de esprit de photographier le groupe de gros barbus et tatoués habillés de noir qui nous a rejoint le premier soir (à la place vous avez cette photo horrible ci-dessus, tant pis), chacun dans son gros 4x4 surmonté d'une tente de toit ils étaient trop mignons (trop mignons mais j'ai pas osé les prendre en photo haha) à être tellement similaires on les aurait dit échappés du concert de Korn, l'un d'entre eux, ayant pris le modèle “amateur de testostérone”, avait une voiture si haute sur pattes qu'il lui fallait monter sur une roue pour tenter d'apercevoir son propre toit. Cela dit et exceptionnellement, je ne crache pas sur les 4x4, je constate qu'ils peuvent être utiles dans ce pays vu les dénivelés et le nombre de routes non revêtues (nombre dont j'ai l'impression qu'il régresse tout de même, en comparant ce que dit notre guide de 2017 avec la réalité et le fait que le macadam est souvent tout neuf sous nos roues et surtout nos amortisseurs fatigués).

J'ai aussi profité des sanitaires communs (délicieusement neufs et approvisionnés de quantités d'eau brûlante) pour observer des rituels de barbus -je suis rarement dans leur salle de bain à les regarder faire-, oui parce qu'on (enfin, je) ne s'imagine pas qu'une barbe doivent être entretenue au-delà d'une petite coupe de temps en temps ? En bien en fait il faut la caresser, lui appliquer des lotions, la brosser tout en lui envoyant de grands jets d'air chaud avec un sèche-cheveux en sortant de la douche, des vraies midinettes de série télé c'est top.

Le parc

Après cet aparté relatif au camping, revenons à notre programme de vacances. Conformément à une habitude désormais bien ancrée, nous avons commencé par rendre une petite visite à la maison du parc qui est sublime et où une dame charmante nous a conseillé sur les balades et sur le comportement à adopter en cas de rencontre avec un ours, car le parc en abrite quelques uns, même si j'apprendrai tout à l'heure sur une pancarte que le territoire d'un ours fait 25 km2 ce qui donne en réalité une densité ursine compatible avec notre usage de l'espace (je dis notre usage à nous parpoil, pas nous l'espèce humaine car là c'est certain que la compatibilité diminue drastiquement).

maison du parc

Sachez donc qu'il vaut mieux ne pas croiser d'ours c'est la règle numéro 1 et les autres semblent en effet tellement dérisoires que... bref il est conseillé de faut faire du bruit, par exemple en frappant dans ses mains, parlant fort et/ou en utilisant un sifflet, c'est-à-dire en se comportant comme les gens qu'on déteste habituellement en randonnée.

Je SAVAIS qu'emporter mon sifflet de cycliste était une bonne idée. De cette manière l'ours sait qu'on est là, il n'a pas plus envie que ça de croiser des humains (je le comprends) et tout va bien. Tout va bien et en plus on prévient tout être vivant dans un rayon de 2 km donc pour voir le moindre animal c'est foutu mais au moins on est vivants.

vivants

Et, vivants, nous faisons des câlins aux arbres.

Nous pressentons tout de même que la psychose actuelle autour des ours (pas franchement injustifiée la psychose me direz-vous, certes) amène les guides à répéter les mêmes consignes en boucle, y compris aux touristes que nous sommes, manifestement taillés plutôt pour l'apéro que pour la course en montagne et qui s'apprêtent à faire une balade facile en même temps que des centaines de personnes à un jet de pierre d'un village.

Cependant, en cas de rencontre usine, j'ai noté que 1. il ne faut pas s'enfuir ni tourner le dos (facile à dire) et EN MÊME TEMPS (le macronisme fait des ravages et ici comme en France il nous mènera tous à notre perte) ne pas le regarder dans les yeux puis 2. reculer tranquillement (sans trébucher sur une racine) tout en apparaissant plus grand qu'on n'est grâce à cette astuce géniale de lever les bras.

Je vous laisse visualiser la scène, pour ma part je compte bien ne pas la vivre. Grâce au sifflet.

Munis de ces précieuses informations, d'une carte encore une fois merveilleusement exécutée, précise et immortelle, nous sommes partis en balade dans des gorges très jolies bien que dépourvues d'eau et garnies sur les côtés de sites d'escalade d'un niveau apparemment démoniaque.

gorges

On n'a pas eu besoin de siffler car on n'était pas seuls du tout mais c'était vraiment bien en plus on s'enfonçait en diagonale dans l'arrête rocheuse donc ça montait, mais doucement. Puis, mûs par le désir maladif de marcher et monter nous avons prolongé la promenade par un sentier de randonnée pour être de nouveau confrontés à des pentes à 20%, ces reliefs glaciaires sont décidément bien peu pratiques, même s'ils n'ont pas l'air de déranger les roumains qui nous dépassent en sandale et en transportant pour tout viatique une bouteille d'eau en plastoc.

alpages

Et nous avons bien fait -de monter- car nous avons atteint la limite des alpages, profité de jolis paysages avant de redescendre doucement vers la vallée. Enfin, doucement au début puis de nouveau dans une pente épouvantablement pentue et glissante nos genoux en ont pris un petit coup. Comme nous n'avons pas utilisé de sifflet nous avons eu le plaisir de croiser des chamois dans le sous-bois (drôle d'endroit pour des chamois mais on ne crache pas dessus, au moins cet animal ne risque pas de nous boulotter).

chamois

Sur le retour on prend quelques photos, par exemple tu es paysan en Roumanie, où ranges-tu ton matériel ? ben devant chez toi, normal :

matériel

Oui entre-temps j'ai découvert les fonctions d'édition de photos de mon téléphone, je vous préviens ça va devenir de plus en plus trafiqué et criard.

#roumanie #ete2024