Quatre minutes

Il ne faut pas toujours de longs mois pour que les choses avancent. Avec M., cette élève de 1RE qui peine dans plusieurs disciplines par faute d'une estime de soi entamée par une timidité maladive, mes rendez-vous durent rarement plus de quelques minutes. Depuis le mois d'octobre, je l'ai vue chaque semaine, puis chaque quinzaine, pour faire le point sur les petits efforts que je lui demande de faire pour vaincre ses terreurs. Pour elle, ce ne sont pas de petits efforts mais de terribles violences. Il faut croire, pourtant, qu'elle a foi en elle, puisqu'elle sort à l'instant de mon bureau avec un sourire que je lui avais rarement vu. Depuis le 9 décembre, elle a levé la main pour participer à tous les cours. Désireuse enfin de dominer sa peur en mathématiques, elle a demandé des conseils à sa professeure et a intégré un petit groupe de camarades qui s'entraident au CDI sur leurs temps de pause. M. est radieuse. En quatre minutes, elle m'a dressé le portrait d'une élève qui n'aurait jamais pensé y arriver, il y a un mois encore. Elle goûte à l'extraordinaire et aime cela. Je l'ai remerciée des efforts qu'elle faisait pour elle, car ce sont des efforts qui bénéficieront à d'autres également.