Mourir ? Hors de question !
La semaine dernière, le lendemain de mon anniversaire, je me suis réveillée avec une douleur sourde dans la poitrine. C'était comme si quelqu'un s'était assis dessus et m'empêchait de respirer profondément. Et d'ailleurs, ça faisait mal, d'inspirer. J'ai pris conscience de cette douleur au petit-déjeuner, après une nuit vraiment merdique où je n'avais trouvé aucune position agréable dans laquelle dormir et je me suis donc posée la question : qu'est-ce qu'il m'arrive ?
Un petit tour vite fait sur un moteur de recherche m'a alertée. Douleur thoracique = consulter et vite. Même si ce n'est pas toujours pour une raison grave ou vitale, il faut éliminer ces dernières avant de procrastiner. J'ai donc appelé le 15 et de fil en aiguille, j'ai fini par passer la journée aux urgences de l'hôpital le plus proche pour des examens qui ont révélé une infection du péricarde. Le soir, j'étais rentrée et depuis, je me soigne à grands coups d'anti-inflammatoires.
Ce matin-là, une pensée a traversé mon esprit. Non, plein de pensées, en vrai, mais une tenace : il est hors de question qu'une deuxième personne meure dans cette cuisine. Il est hors de question de mourir pour moi, quels que soient les moments compliqués par lesquels je passe, quelle que soit la tristesse qui est parfois la mienne, quel que soit le manque d'intérêt que j'éprouve pour la vie, il est hors de question que je meure. Je veux vivre.
Et c'est sans doute stupide mais le formuler à voix haute comme je l'ai fait en attendant les ambulanciers, ça m'a aidé à franchir un nouveau cap. J'ai dit à mon amoureux qu'il n'était pas l'heure pour moi de le rejoindre et que cette fois, j'allais m'écouter, écouter ce que mon corps avait à me dire avant qu'il ne soit trop tard. Je lui ai dit que je l'aimais mais qu'il me restait encore des choses à vivre et que je ne lâcherais pas l'affaire.
J'ai beaucoup pleuré dans l'ambulance qui m'emmenait vers la ville voisine. Stress, chagrin, soulagement ? J'ai gentiment craqué, avec la bénédiction de l'ambulancière qui avait l'âge de mon fils cadet. Je me disais que mon cœur avait fini par se briser pour de vrai en mille morceaux sous le chagrin, que la mort de mon amoureux avait fini par me rattraper, moi qui avais l'impression de plutôt bien m'en tirer jusque là. Elle m'a doucement rappelée à la réalité : le chagrin ne part jamais vraiment, on ne se remet jamais vraiment d'un deuil, il ne fait que s'estomper, passer au second plan...
Mon cœur n'est pas cassé. Je ne suis pas cassée. Je suis vivante et je ne veux pas que cela change, mon corps est vivant, il bouge, il vibre, il s'enflamme, il a mal. J'ai signé tout à l'heure le compromis de vente pour la maison que je convoitais. Tout le monde m'a dit “Vous avez eu un “coup de cœur” pour cette maison” et c'est vrai. Mon cœur n'est donc pas cassé, il bat encore et je construis, je fais des projets, je me projette vers l'avenir, j'essaie, en tout cas.
Mon amoureux me manque à en crever, d'accord mais mourir, c'est hors de question !