Tête-à-tête avec mon chagrin

Ça y est, Noël est passé. Et je suis toujours debout, évidemment. Et j'ai même passé quelques bons moments, évidemment. Et j'ai caché mon chagrin, évidemment.

Je ne vais pas raconter des salades non plus, il y a aussi eu des moments difficiles, des moments où ma solitude (même très entourée) m'a sauté au visage, des moments de pure tristesse et un sentiment de totale injustice parce qu'il n'était pas là pour faire honneur au poulet aux morilles de mon papa, aux truffes de ma tante, pour jouer au tarot avec mes neveux et nièces, pour construire un chat en Légo avec la petite dernière (qui l'adorait), pour regarder tomber la neige puis aller marcher dedans (c'était le premier Noël blanc depuis des années)...

Il ne connaîtra plus jamais ces joies simples et familiales, les engueulades autour du “petit” qu'on n'a pas mené au bout, les sourires en regardant les autres ouvrir leurs cadeaux ou les négociations sur les tours de vaisselle, il ne m'offrira plus des dizaines de bouquins ni le calendrier de l'Avent des thés Damman, il ne vivra plus aucun hiver, aucune fête et moi je dois continuer à vivre tout ça sans lui, c'est tellement injuste et difficile.

Je me suis pas mal réfugiée dans la lecture, ma fidèle compagne depuis que j'ai 6 ans, cela m'a permis de regarder d'un œil un peu distant ce gentil “bazar” familial. J'ai participé, un peu mais j'ai très souvent eu le sentiment de ne pas être vraiment là, avec eux. Eux qui ont tourné la page plus facilement que moi, eux qui continuent leur petit bonhomme de chemin (et c'est tant mieux). J'ai essayé de ne pas trop parler de lui, comme j'ai tendance à le faire naturellement (je pense que je fais ça pour que personne ne l'oublie). J'ai fait ce que j'ai pu pour ne pas plomber l'ambiance mais 6 jours en famille, c'est un peu le maximum que je pouvais donner.

Ma mère a commencé à poser des jalons pour le Réveillon du 31, cela lui pèse de savoir que je puisse être seule pour passer le seuil de cette nouvelle année. Je lui ai dit que si je choisissais d'être seule, ce n'était pas grave, que je serai pas malheureuse. Mais la vérité, c'est que j'ai besoin d'être en tête-à-tête avec mon chagrin, un peu.