Mon Himalaya
Vue sur l'Himalaya – Domaine public
J'ai envoyé hier ma première proposition de cadre théorique à mon directeur de mémoire. Comme je l'indiquais dans mon précédent post, c'est l'étape qui m'impressionnait le plus dans mes pérégrinations. Construire un cadre théorique signifie avoir des références théoriques... et là, le doute s'installe vite.
Prendre confiance
Je suis lente à lire, comprendre, assimiler, résumer... J'ai besoin d'au minimum 2 heures pour un article, et cela peut facilement aller jusqu'à 4 heures. Ce blog m'a aidée car c'était l'occasion de reprendre les notions vues, de les combiner, et de m'assurer que l'ensemble était cohérent. Peu à peu, malgré mes difficultés, j'ai senti que la lecture de nouveaux articles devenait plus aisée, parce que des notions commençaient à s'ancrer et s'articuler entre elles. Restait à m'atteler à la rédaction. Je sentais que je commençais à avoir du contenu, j'ai commencé une carte mentale, je butais encore sur l'organisation et le sens à donner à l'ensemble. C'est là qu'avoir dans son entourage quelqu'un qui suit mon travail est précieux ! Une amie m'a dit deux choses : “tu as ce qu'il faut” et “il est temps”. L'impulsion était donnée. J'ai repris mes lectures, j'ai fait le point sur les domaines de recherche des auteurs, j'ai compilé toutes les citations qui me semblaient pertinentes ou potentiellement utilisables, j'ai repris également ma carte mentale... Comment organiser ? Par discipline convoquée (Sciences de l'Information et Communication, Sémiotique ?) ou par notions ? J'ai finalement pris une approche plus pragmatique en partant du lieu où tout se passe, la rencontre entre un site (avec derrière ce site, ces concepteurs) et un usager, à savoir, l'écran. J'ai alors commencer à tout tricoter ensemble, et, lentement, laborieusement, ça a pris forme. Je me suis rendu compte que j'avais assez de contenu et que le tout était plutôt cohérent. C'était finalement plaisant de faire le lien entre toutes les notions, j'ai vu peu à peu l'idée d'accessibilité (l'objet de mon état de l'art) prendre sa place au sein des champs de recherche. Et cela m'a permis aussi de faire émerger ce qui va vraiment me servir par la suite.
Quelle trame ?
tissage en cours
J'ai d'abord précisé ce que j'entendais par “sites de chercheurs”. Puis j'ai donc considéré l'écran, cet écran noir qui ne devient signifiant que si lui et la machine à laquelle il est relié sont en fonctionnement. L'usager a alors face à lui une “page-écran” à la fois une interface et un support (N. Pignier). Que lui offre cette page-écran ? Des “écrits d'écran” (E. Souchier, Y. Jeanneret) et du “fatras sémiotique” (M. Desprès-Lonnet). L'ensemble est le résultat d'une “énonciation éditoriale” (E. Souchier, Y. Jeanneret) qui s'est faite en amont, lieu de multiples influences humaines et non-humaines. Ce lieu, dans le contexte de sites de chercheurs, est particulièrement important, car la sémiotique des écrans et le webdesign ne sont pas la préoccupation des chercheurs, alors qu'ils sont nécessaires (bien qu'insuffisants) dès lors qu'on a le souci de l'accessibilité. Enfin, je pose la question de ce lieu de la page-écran comme lieu de médiation (P. Fraysse, V. Liquète).
En rédigeant ce paragraphe, je m'aperçois que je mets en place une articulation logique dans le passage de l'énonciation éditoriale à la sémiotique et au web design que je n'avais pas vue jusqu'à présent. Encore une raison de poursuivre cette écriture, et un argument pour prendre le temps de poser sa réflexion, de la laisser mûrir et d'y revenir.
Douter, encore, toujours...
C'est maintenant l'attente du retour de mon directeur de mémoire. C'est aussi toujours s'interroger sur les notions, notamment sur celle d'écrits d'écran d'E. Souchier qui ne me paraît toujours pas très claire. J'ai tendance à appréhender cette notion comme “les écrits qui apparaissent à l'écran”, ce que lit l'usager. Mais E. Souchier intègre aussi ce qu'il écrit. Et là, je n'arrive pas à distinguer l'endroit où cette écriture se fait : des supports type blogs ou réseaux sociaux ? Ou encore de plateformes de création de sites ? Mais qui est le scripteur alors ? un usager ou un professionnel ? E. Souchier parle de “lettrure”, ce mot médiéval qui associe l'acte de lire à celui d'écrire. Je trouve l'idée intéressante, mais elle ne m'aide pas à clarifier le tout. J'avais été interpellé par la remarque de N. Pignier qui dit s'éloigner de cette acception d'écrits d'écran
nous ne pensons pas que l’écrit soit « tout à la fois l’objet et l’outil » du réseau internet. (1)(p.93),
et préfère ouvrir la réflexion sur les pages écrans des sites web et leur portée sémiotique. Son approche me paraît plus pragmatique, et bien adaptée à mon travail. Peut-être est-ce là que se loge la réticence que j'avais noté de mon directeur de mémoire à l'évocation du nom de E. Souchier ?
Confiance, doute... J'ai le sentiment d'être à un moment où les deux sentiments co-existent de façon constructive.
... mais poursuivre
La priorité maintenant ? Construire ma grille d'analyse. J'ai 3 modèles sur lesquels je compte m'appuyer : – la grille sémiotique de N. Pignier – un tableau d'analyse de corpus d'E. Souchier (2) – les critères du Référentiel Général d'Amélioration de l'Accessibilité. Je compte également prendre le temps de relire mes notes, vérifier que je ne laisse pas de côté une idée qui pourrait être intéressante. Je pense poursuivre, en parallèle de ce travail plus concret de construction et d'utilisation d'outils, des lectures pour continuer à nourrir la réflexion. J'ai entamé celle de certains articles dans la rédaction du cadre théorique, sans formaliser leur prise de notes, et d'autres sont restés sur le bord du chemin, mais méritent je pense le détour.
Un dernier mot sur l'accessibilité : sur le réseau social Mastodon, et dans mon entourage, je suis en contact avec des personnes concernées par le sujet, et je commence à prendre la mesure de toutes les difficultés liées au handicap... C'est les 20 ans de la loi de 2005 sur l'accessibilité en France. Si peu de chemin parcouru depuis...
(1) Pignier, N. (2009). Sémiotique du webdesign : Quand la pratique appelle une sémiotique ouverte. Communication & langages, 159(1), 91‑110. https://doi.org/10.3917/comla.159.0091 (2) Souchier, E., Candel, E., & Gomez-Mejia, G. (2019). Le numérique comme écriture : Théories et méthodes d’analyse. Armand Colin.