[Lecture] Paresse pour tous

« Ce qu’il faudrait c’est que la gauche soit capable de créer des nouveaux récits qui donnent envie. » J’ai entendu cette phrase mille fois, je me suis dit que c'était peut-être vraie. Maintenant, je sais que cette phrase est fausse.

Une société qui n’est plus désirable

Il n’y a pas besoin de lire le livre de Sandrine Rousseau (mais c’est très bien de le faire) pour constater que notre modèle de société n’est absolument pas désirable. Le travail abîme les ouvriers comme les cadres. Il n’y a plus d’ascenseur social. Notre système d’agriculture agro-industriel nous donne diabète et cancers. Et notre planète se réchauffe à un rythme qui met en danger des milliards de personnes.

Le dogme de l’efficacité

Les valeurs clés de notre société sont la performance et l’efficacité. Il faut gagner du temps, aller plus vite, en faire plus, toujours plus. Avec les machines, le pétrole, puis avec le numérique nous avons accéléré. Nous produisons de plus en plus et de plus en plus vite. Et qu’avons nous gagné ? Le droit d’en faire plus pour acheter des biens et des services qui nous apportent une consolation éphémère.

Aujourd’hui, tout va trop vite. Il y a trop de films, trop de séries, trop de livres. On n’a pas le temps de « consommer » tout ce qui nous intéresserait, on est tout le temps en train de passer à côté de quelque chose. Il y a aussi trop d’objets, trop de vêtements, trop de voitures, trop de tout. Et on n’a pas assez de temps pour nous, pour rêver, pour profiter de nos proches tant qu’il en est encore temps. On passe à côté de nos vies.

Ralentir, pour prendre le temps de vivre

Passer moins de temps à gagner sa vie

Dans « Paresse pour tous », le héros est un économiste qui défend la thèse qu’on pourrait travailler moins (quelques heures par jour), et que la société irait mieux.

L’un des qui-pro-quo du livre est que le héros ne défend pas le fait de ne rien faire, mais d’avoir des heures chaque jour pour faire des choses qui ne créent pas de valeur pour le PIB des économistes. Sur le temps libéré on pourrait : dormir, entretenir un jardin partagé, cuisiner, s’occuper des enfants, lire, écrire, militer, construire, … VIVRE !

Des économies si on travaille moins ?

La thèse défendue est que si l’on travaille moins, alors on bougera plus, on sera plus reposé·es, on se nourrira mieux puisqu’on aura du temps pour cuisiner. On sera donc en meilleure santé ! Et donc, ça coûtera moins cher à la sécu.

Comme on aura plus de temps, on fera moins de voiture. La qualité de l’air sera meilleure, on utilisera plus le vélo et nos pieds, et donc on sera en meilleure santé. Et si on fait moins de voiture, on a moins besoin d’énormes routes qui coûtent cher à construire et à entretenir. Bref, encore des économies pour la société.

Ce projet est distillé au cours du livre et donne vraiment envie d'essayer.

Qui a envie de travailler moins pour vivre mieux ?

« C’est une utopie c'est impossible !! » répondrait mon père avec condescendance envers sa fille qui ne comprend toujours rien à 40 ans au monde des adultes. Aujourd'hui, en tant qu'adepte fervent de la religion du capitalisme, de sa morale du travail, et de son saint esprit, la main invisible du marché, il voterait contre ce projet. Alors même que le projet lui plait au fond.

Dans le livre « Paresse pour tous », notre économiste qui vient de recevoir un prix Nobel, accepte de se lancer dans la course pour la présidentielle. Pour porter un message.

Et le roman nous montre comment cette idée prend, même chez les retraités qui détestent le changement surtout si ça améliore la vie des jeunes. Mais aussi comment le vieux monde lutte à tout prix contre cette libération des pauvres. Ils doivent travailler pour vivre et vivre pour travailler ! Rien de pire que des pauvres oisifs qui auraient le temps de penser pour elleux.

Un chouette roman

Et en plus c’est bien écrit, un page turner comme on dit. Bien que ça soit écrit par un homme (Hadrien Klent), que le héros soit un homme, je n’ai pas trouvé le roman sexiste.

Ce n’est pas non plus cucul, les protagonistes rencontrent des difficultés crédibles, comme le fait de faire campagne pour réduire le temps de travail, tout en travaillant trop pour gagner la bataille.

Bref, j’ai envie d’offrir ce livre à tout le monde. Je fais mon petit lobbying en le demandant dans toutes les librairies et relais où je passe ^^.

Lisez-le et venez me dire ce que vous en avez pensé. J'adorerais qu'on soit plein à en parler... Et que l'utopie prenne !