nous sommes
mince ruisseau
eau vive à peine
faible miroir
bien peu de fond
eau venue de nulle part
qui semble aller au hasard
mais nous savons où est la pente
où pouvoir disparaître
ni ronflement de torrent
ni fracas de déversoir
le ruisseau ne chante pas
il chuinte et marmonne
glousse et pépie
entre ses bords sans écho
au fil de l'eau notre filet de voix
nous sommes
eau ridée d'un lent tourbillon
qui longuement rêve en rond
avant de partir invisible
vers une autre courbe
dans l'ombre d'une branche basse
qui frôle sa surface
mince ruisseau
faible miroir
bien peu de fond
25 avril 2024
#nousSommes

sous la rage du vent
froissement de feuilles
sifflement de branches
vibration de troncs
d’un trop faible souffle
nouer leurs couplets
fredonner leur refrain
du bout des lèvres
langue à peine frémissante
à l'intérieur
paroles perdues de la forêt
si sur la page glisse
une langue à peine mobile
au bout du stylo
#photo #poésie
“Wind in the Oak Tree” par Peter E. Lee, licence CC BY-NC 2.0.
ma mue de printemps
je deviens
lourdes eaux limoneuses
à ma surface mouvante
reflets dorés
du soleil de mars
je deviens
amère amande blanche
par mon poison rapide
les lèvres se révulsent
en un crachat
je deviens
sciure de bois tendre
ma poussière retombée
boit la boue noire
d'une flaque
nous marchons en secret sous un rideau de pluie
dans l'ombre de nos pas les ronces se redressent
les rêves ont perdu pied sous les paupières closes
au bout du chemin on a laissé quelque chose
ni lueur ni mystère
ni chansons ni regrets
océan trop grand trop proche horizon
vie trop pleine et trop vide aussi
des heures que l’on place
sur un grand tableau vide
comme pions sacrifiés
le long de l'eau
où rien ne reste
sur le bord au plus près
on mord à même le flot
puis on boit à grands traits
un autre monde coule entre les lèvres
sans que son eau glacée nous désaltère
chaque rivière que nous suivons
a son fil de terres et de sang