adventices

ça pousse comme ça veut

facile fenêtre d'autrefois ni ouverte ni fermée pour l'enfant insouciant sauter dehors dedans entrer sortir d'un bond au rez-de-chaussée il faut dire

pas d'autre risque alors que le visage inquiet d'une mère fatiguée


28 avril 2024

j'ai compté recompté mes journées mal rangées aux heures mal alignées mes années désordonnées aux mois entiers effilochés — jamais trouvé le même nombre !

est-ce avant d'être adulte ou après que je suis devenu enfant ? et le temps qui me reste il est derrière ou devant ?

dans ma vie à l'envers les moments tourbillonnent

   


Format portrait
Sous un ciel de nuages noirs menaçants occupant 2/3 de la hauteur, au premier plan une prairie en herbe déjà hautes montant en pente douce jusqu’à un arbre au jeune feuillage à contre jour, décentré sur la droite de l’image. De part et d’autre, dans les lointains les profils doux de deux hauteurs couvertes de végétation presque noire, laissant entre elles juste l’espace nécessaire pour loger l’arbre sur un fond de ciel plus lumineux que le reste des nuages.

un instant plus de vent

l'herbe attend que le torrent de là-haut l'abreuve enfin

la montagne fait le dos rond elle aussi attend l'orage qui plane

l'arbre seul tendu vers le ciel ouvre ses branches

il se gorge de clarté ne laisse à la prairie que poussières de lumière

quatre millièmes de seconde puis l'équilibre est rompu

   


Photo par Gilles Le Corre « 25 Avril 10h 11. En redescendant vers le village…» Courtesy of © Gilles Le Corre & ADAGP


nous sommes mince ruisseau eau vive à peine faible miroir bien peu de fond

eau venue de nulle part qui semble aller au hasard mais nous savons où est la pente où pouvoir disparaître

ni ronflement de torrent ni fracas de déversoir le ruisseau ne chante pas il chuinte et marmonne glousse et pépie entre ses bords sans écho

au fil de l'eau notre filet de voix

nous sommes eau ridée d'un lent tourbillon qui longuement rêve en rond avant de partir invisible vers une autre courbe dans l'ombre d'une branche basse qui frôle sa surface

mince ruisseau faible miroir bien peu de fond

25 avril 2024

#nousSommes


sous la rage du vent froissement de feuilles sifflement de branches vibration de troncs

d’un trop faible souffle nouer leurs couplets fredonner leur refrain du bout des lèvres langue à peine frémissante à l'intérieur

paroles perdues de la forêt si sur la page glisse une langue à peine mobile au bout du stylo


#photo #poésie “Wind in the Oak Tree” par Peter E. Lee, licence CC BY-NC 2.0.


depuis le pont

lourdes eaux limoneuses du fleuve furieux

remous incessants courants bouillonnants dans toutes les directions

œil hypnotisé cœur penché au ras des eaux des heures à les surprendre et à les perdre pour d'autres tourbillons

une journée bien employée

au creux des marais

obstinés fouillant les flaques

les deux oiseaux blancs     le vent achève sa conquête

sur nos sombres eaux ridées

   
Photo “Two White Egrets” par Mike Boswell, licence CC BY 2.0.

il y a toujours un passage ouvert le temps d'un souffle entre deux eaux qui menacent

on se tord les pieds sur de gros galets entre les rochers

sur cette autre terre la vie qu'on espère

là-bas d'autres anses d'autres falaises et le seul horizon d'une mer grande ouverte

il y a toujours un passage

 
Photo par Ian Cylkowski, licence CC BY-NC-SA 4.0


ma mue de printemps

je deviens lourdes eaux limoneuses

à ma surface mouvante reflets dorés du soleil de mars

je deviens amère amande blanche

par mon poison rapide les lèvres se révulsent en un crachat

je deviens sciure de bois tendre

ma poussière retombée boit la boue noire d'une flaque

 


bravement elles poussent dans le désordre du bord — fleurs de rien du tout

sur la pierraille des jours minuscules éclats de ciel

 


Photo jbm CC0