AMOUR
Logogram
(logogramme signifiant "humain")

Je crois en l’amour. Pas l’amour au sens commun, populaire, répandu du terme. Je ne crois pas à ce prince charmant qui, fort de son autorité sur mes peurs, viendrait me sauver de ma vulnérabilité. Je ne crois pas non plus que m'offrir en sacrifice par dévouement sauvera qui que ce soit.

Je crois plutôt que je suis amoureuse de ce monde et de sa matière vivante, sans vouloir m'accaparer personne. L'amour pour lequel j'opte s'appelle “philotès”, au sens où l’entend Empédocle.

« Tous les êtres, disait-il, ne sont que des morceaux disjoints de cette sphère d’Amour où s’insinua la Haine. Et ce que nous appelons Amour, c’est le désir de nous unir et de nous fondre et de nous confondre, ainsi que nous étions jadis, au sein du dieu globulaire que la discorde a rompu. »

Marcel Schwob rapportant les paroles d'Empédocle, dans Vies Imaginaires ISBN : 2070258408

C’est en cet Amour que je crois, jusqu’à la conviction. L’attirance des contraires. La complétude dans la différence. L’accueil de l’altérité, au plus profond de notre intimité individuelle. Cet amour qui est passible de tous nous relier, qu'importe les distances ou les conflits. A la manière d’Anaxagore, Empédocle parle d’un monde mouvant, que Lavoisier définit en ces termes « rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme ». Ni séparation dramatique, ni réunion salutaire. Tout est déjà là.

Le concept est à la fois scientifique et spirituel. Je ne crois pas devoir chercher l'amour, je le vois déjà partout. Nous avons besoin les uns les autres, pour nous nourrir, nous chauffer, nous protéger, nous instruire. La base de nos besoins primaires est liée à notre besoin d'appartenance. Nous sommes liés les uns les autres, à travers les liens insibles d'un Filet d'Indra.

J'utilise une image, et pourtant ma réflexion est concrète. Matérialiste. Sensible. Elle me ramène au fait que nous soyons, malgré les croyances auxquelles nous nous raccrochons, interdépendants les uns des autres.

Enfant, l'être humain ne peut quasiment rien faire de manière inné sans apprentissage. L'Expérience de Frédéric II démontre même que le nouveau-né n'est pas capable de survivre sans l'affection de ses congénères.

Thích Nhất Hạnh parle d’ « inter-être », non pas au sens où nous n’avons pas d’individualité propre, mais au sens où cette individualité est nourrie par les autres. Si notre espèce est animale, la survie de chaque être dépend de l'environnement dans laquelle il évolue. Si chaque rejet engendre une souffrance viscérale, c’est parce que c’est inscrit dans notre corps: le rejet pour une espèce qui fonctionne en groupe, signifie la mort.

Lire cet article pour comprendre pourquoi l’ostracisme (ou rejet social) signifie la mort pour notre organisme: « Que se passe-t-il dans notre cerveau lorsque nous sommes rejetés ? » D’Elena Sanz (nospensées.fr)

Je crois en la haine aussi bien que l’amour. Je crois que ce sont des forces qui cohabitent, et qui s’affrontent à l’image de la légende du loup noir et du loup blanc, sans qu’il y ait pour autant de vainqueur à désigner. Je crois que la Haine ne disparaîtra jamais. Mais je crois également qu’on peut s’en remettre, et qu’on peut y résister. Et comme le dit Empédocle, je crois aussi que tout passe par notre corps, notre sang, notre souffle. Même si ces propos ne semblent pas scientifiques, je les revendique.

Je crois que le mur invisible (de silence, de distance, d'ignorance ou d'indifférence) qui nous sépare les uns les autres, n'est pas différent de celui qui sépare l'Hectapod de la linguiste, dans le film Premier Contact. Je pense aussi que cette dernière a raison, de ne jamais perdre la paix de vue, même quand la moindre erreur de traduction peut mener à une guerre inter-mondiale.

Premier Contact

Dans ce contexte où la paix entre l’Ukraine et la Russie semble désespérée, où Gaza saigne, où l'écosystème s'effondre, où nos puissants ne trouvent pas en eux la puissance nécessaire à éteindre l’incendie, j’essaie d’attendre. Mais attendre ne signifie pas que je fais rien. J’attends quelque chose, précisément. J'attends patiemment le jour où l’Amour se montrera plus endurant que la haine, et que cela devienne viral, mondial, universel... Je m'accroche à cette attente-là. Je m'y accroche. De toutes mes forces...

“Ça flambe, mes frères, ça flambe, Il n’est de salut qu’en vous-mêmes, Prenez les outils, éteignez le feu, Eteignez-le de votre propre sang. Vous le pouvez, alors prouvez-le ! “

“Es brent!” (ça flambe), Poème yiddish de Mordekhaï Gebirtig, 1936.

Divinité associée : Ganesh, divinité hindoue de la sagesse, de l'intelligence, de l'éducation et de la prudence. Ses adpetes encouragent la persévérance, la capacité à surmonter les obstacles et l’importance de la connaissance.

KAENA.

Mon compte MASTODON

Ma chaîne PEERTUBE

Ce travail est sous licence CC BY-NC-ND 4.0