Writever est un petit défi d’écriture collectif de microfictions qui propose un mot par jour pendant un mois. On peut rédiger une histoire en une trentaine de publications ou une trentaine de récits indépendants. On peut produire tous les jours ou pas. La liste est donnée au début du mois. À partir du mot déclencheur du jour, chaque participant écrit un texte court (moins de 500 caractères sur la plupart des instances de Mastodon) relevant de la science-fiction, fantasy ou fantastique, sans oublier de mentionner le hashtag “#Writever”.
Alors voici le #Writever d'août 2024.
via @vcorlaix
01 – Sale
Le ciel est d'un bleu intense, la mer scintille comme des diamants, une petite brise apporte un peu de fraîcheur. Naira s'assoit sur le sable en regardant l'océan. Elle essaie de faire le vide dans sa tête pour retrouver un peu de sérénité, car elle a passé une sale semaine.
Son employeur lui a annoncé que la boîte était rachetée. Sa voiture est tombée en panne et les réparations vont coûter 1600 euros. Théo est parti hier et n'a plus donné de nouvelles.
02 – Maison
Un goéland argenté vient d'attraper une étoile de mer. Un jeune enfant joue parmi les rochers. Accroupi, il essaie d'attraper quelque chose dans une petite mare. Sa mère, dans l'eau jusqu'à la taille, le surveille du coin de l’œil. “Gabriel, tu viens, on va bientôt rentrer à la maison”, dit-elle.
Alban, debout face à la mer, ne se lasse pas des couchers de soleil. Il savoure la tiédeur du soir et observe la vie tranquille de cette fin de journée d'été.
03 – Eau
L'eau est l'or bleu du 21ème siècle. Mais il y a une différence de taille entre l'or et l'eau : on peut se passer d'or pour vivre, mais pas d'eau. D'ailleurs, un proverbe amérindien rappelle l'importance de la nature pour la vie. L'argent ne se mange pas, l'or ne se boit pas.
C'est une des raisons pour lesquelles Eva n'a jamais été riche et a toujours vécu à la campagne, pas loin de la mer. Aujourd'hui, elle habite à 20 minutes de la côte, en vélo.
04 – Huile
Cheveux au vent, elle adore pédaler sur la voie verte qui offre 10 kilomètres de promenade sous les arbres, loin de la route.
Elle a dû s'arrêter sur le bord de la piste cyclable. Une punaise s'est engouffrée dans le caoutchouc et le pneu est crevé. N'ayant pas de bombe anti-crevaison sous la main, Eva retourne son vélo, retire la punaise, démonte la roue, sors la chambre à air, la remplace, remonte le tout et regonfle le pneu, à l'huile de coude.
05 – Essentiel
Au moment de se remettre en selle, elle ressent un léger malaise. Quelque chose dans l'air a changé. Suivant son intuition, Eva se dirige vers un petit sentier qui monte sur sa droite. Pour elle, faire confiance en son instinct est essentiel.
Un bourdonnement attire son regard près d'un buisson de mûres sauvages. Les couleurs désertent son visage, elle se retourne pour vomir les délicieuses Saint-Jacques qui l'ont régalée ce midi.
06 – Mesuré
Les yeux ouverts sur le ciel pour l'éternité, un homme est allongé sur le dos en travers du chemin, une main agrippée à sa poitrine. Sa mort ne fait aucun doute. Une dizaine de mouches s'agitent autour d'une vilaine plaie au genou. Âgé d'une quarantaine d'années, l'homme semble pourtant serein.
Remise de ses émotions, Eva contourne le cadavre à pas mesurés, puis appelle la police.
07 – Soude
Le goéland a englouti l'étoile de mer avant de s'envoler. La mère et l'enfant sont partis. De la petite mare, un crabe sort de l'eau et se faufile au milieu de plantes halophytes, de la soude commune sans doute.
Dans sa contemplation, Alban remarque une jolie brune qui vient de se lever et marche d'un pas décidé vers l'océan. Avec le soleil couchant en contre-jour, sa silhouette s'est changée en ombre chinoise mouvante.
08 – Mélanger
Médecin généraliste installé depuis 6 ans dans la région, il a toujours été attiré par la Bretagne. Il repense à ses patients, cette dame âgée qui vit seule, ce gamin diabétique, ce technicien déprimé, des personnes attachantes. Certaines doivent faire face à des situations dramatiques.
Les pensées se mélangent dans sa tête. Alban aimerait prendre le temps dans ses consultations qu'il doit souvent expédier en 10 minutes pour tenir le rythme imposé.
09 – Patchouli
Naira vient de passer 20 minutes dans l'eau fraîche. Le bain de mer l'a rassérénée. Détendue, elle se rassoit sur le sable et s'enroule dans un paréo. L'odeur de patchouli qui imprègne le tissu lui rappelle des moments de pur bonheur avec Théo.
L'inquiétude revient.
- Mais qu'est-ce qu'il fait ? Où est-il ? Pourquoi il ne me rappelle pas ?
10 – Battre
10 minutes, c'est vraiment trop peu ! Vous avez à peine le temps de prendre le pouls du patient qu'il faut déjà remplir l’ordonnance et passer au suivant. Vous devez vous battre avec un planning de plus en plus serré, pas de place pour le bavardage. Pourtant, bien des guérisons s'améliorent avec une écoute attentive et bienveillante.
Alban avoue, il dépasse souvent la durée imposée.
Le soleil disparaît à l'horizon.
11 – Trace
Sur la terrasse d'un restaurant 4 étoiles situé en bord de mer, Naira s'installe avec Théo et s'apprête à passer un dîner agréable. Le cocktail a un goût amer.
Soudain, un grondement fait trembler le sol. La mer se retire d'un coup. Au loin, une vague se forme, grossit et s'approche. La panique s'empare de tout le monde. Naira court dans les escaliers pour se réfugier sur le toit. Sa main lâche Théo, elle perd sa trace. La vague commence à déferler...
12 – Lessive
Le tsunami emporte tout sur son passage. Les gens, les arbres arrachés, les voitures sont malmenés comme le linge d'une immense lessive.
Il ne reste que 6 personnes réfugiées sur le toit. Théo a disparu. Une deuxième vague arrive, mais à l'intérieur du rouleau, bras tendus, un surfeur glisse dans le tube doré par le soleil couchant...
- Dring !
Naira se réveille en sursaut. C'était un rêve. Non, mais un surfeur au milieu d'un tsunami ?
13 – Doser
Le soleil matinal qui illuminait la chambre disparaît derrière un nuage. Un merle solitaire chante une sérénade, un pinson lui répond. Une légère brise entre par la fenêtre entrouverte. Le réveil indique 08:13.
- Dring ! Dring !
- Qui peut bien venir sonner à une heure pareille un dimanche matin ? Les emmerdes, j'ai eu ma dose !
Naira s'extrait péniblement du lit et se dirige vers la porte d'entrée, les cheveux en pétard, comme son humeur.
14 – Propre
Avant d'ouvrir, elle enfile le long gilet vert qu'elle aime tant. Un homme et une femme en uniforme patientent à l'entrée.
- Madame Sullca ?
- Oui, c'est moi, pourquoi ?
- Bonjour, je suis l'inspecteur Navarro et voici le lieutenant Carof de la police de Quimper. Pouvons-nous vous parler ?
- Qu'est-ce qu'il se passe ? J'ai fait quelque chose ?
- Non, nous avons juste besoin de vous parler. Pouvons-nous entrer ?
Des flics dans sa propre maison ?
15 – Pigment
Naira hésite, a-t-elle le droit de refuser ? Elle s'efface finalement pour les laisser entrer, les guide vers le salon et les invite à s'asseoir.
La table basse est encombrée par les restes du repas solitaire de la veille. Nerveuse, Naira commence à débarrasser en s'excusant.
Mais la manche de son gilet fait tomber le flacon de curcuma resté ouvert. La poudre orange se disperse sur ses genoux et imprègne le tissu comme le pigment d'une teinture ratée.
16 – Moule
Naira pousse un juron, puis s'excuse encore. Les moules au curcuma étaient fantastiques, le Muscadet excellent.
- Désolée, je suis rentrée tard hier soir, je n'ai pas eu le courage de ranger.
L'inspecteur lui demande de s'asseoir avec insistance. Naira s'exécute.
- Vous connaissez Théo Perrin ?
- Oui, justement, il ne me donne plus de nouvelles depuis vendredi matin. Pourquoi ? Il lui est arrivé quelque chose ?
Naira commence à comprendre.
17 – Cure
- Non ! Ne me dites pas qu'il est...
L'homme acquiesce d'un hochement de tête. Embarrassée, la femme qui l'accompagne joue avec une boîte de cure-dents posée sur la table. Naira s'effondre. Comme pour accompagner ses sanglots, le ciel se met à pleurer. Une odeur de terre mouillée se répand dans la maison.
- Comment ? Qu'est-ce qu'il s'est passé ? Un accident ? Où ça ?
- Si on peut dire. Tout semble indiquer une crise cardiaque, répond l'inspecteur.
18 – Lavande
Compatissante, la policière met le bras sur l'épaule de Naira. Dehors, une bourrasque malmène les plants de lavande installés devant la porte fenêtre.
- Mais ce n'est pas possible ! Théo était en pleine forme. Il faisait du sport tous les jours. En plus, personne dans sa famille n'était cardiaque.
- Une cycliste a trouvé son corps sur un sentier de randonnée, tout près de la voie verte.
Nouvelle vague de larmes...
19 – Séché
- Madame Sullca, reprend l'inspecteur. Vous avez dit “n'était cardiaque”. Cela signifie que Monsieur Perrin n'a plus de famille ?
- Non, ses parents sont morts dans un accident de la route en 2009, il n'a ni frère ni sœur.
Dehors, un mouvement attire l'attention de Naira. Après avoir séché ses larmes et étouffé un sanglot, elle voit un ciel aussi gris que son âme. Puis un adorable petit chat tigré vient s'abriter sous le rebord de la fenêtre.
20 – Exfoliant
Un rayon de soleil perce les nuages. Le chaton gratte la vitre comme pour demander à entrer.
- Madame Sullca, avez-vous de la famille proche pour vous soutenir ?
- Mes parents, mon frère, une amie...
Exfoliant les pétales des fleurs des rosiers, une autre bourrasque revient tourmenter les plants de lavande. Vaillant, le petit chat résiste aux assauts du vent. Il échange un regard avec Naira.
Les deux policiers se lèvent pour partir.
21 – Vanille
La femme sort une carte de sa poche et la tend à Naira. Son poignet dégage un délicat parfum de vanille.
- Ne restez pas seule. Si vous avez besoin de quelque chose, une cellule d'écoute se tient à votre disposition. N'hésitez pas à appeler.
Naira se lève pour accompagner les policiers. En passant la porte d'entrée, le chaton en profite pour se faufiler à l'intérieur et entreprend le prélavage de l'assiette restée sur la table.
22 – Patience
Pat Navarro s'installe au volant de la voiture. A ses côtés, Elsa Carof observe le merle qui essaie de briser la coquille d'un escargot sur le trottoir d'en face. Elle admire sa patience.
- Décidément, annoncer la mort d'un proche à quelqu'un restera toujours la tâche la plus ardue, dit-elle.
- Oui, enfin, heureusement, tu n'as pas eu à le faire.
- C'est vraiment la pire chose à faire.
23 – Parfumé
Le merle a réussi sa mission et s'envole avec son butin dans le bec.
- Dis, Pat, ça ne te paraît pas bizarre qu'un homme en pleine forme meure subitement d'une crise cardiaque ?
- Hmm... Tu as raison. On va vérifier deux ou trois petites choses. Je connais quelqu'un qui pourra nous aider. Il suffit de le mettre au parfum, il pourra nous obtenir des infos.
24 – Bulle
Après le rush du lundi matin, la salle d'attente du cabinet médical redevient calme. Une dame âgée attend son tour de consultation, son sac à main posé sagement sur ses genoux. Un ado patiente également, plongé dans sa bulle, ses mains s'agitant frénétiquement sur son smartphone.
Alban vient de finir sa consultation et s'apprête à passer à la suivante. Un couple de policiers fait irruption dans la salle.
- Bonjour, est-ce qu'on peut vous parler ?
25 – Pain
Une délicieuse odeur de pain grillé s'infiltre par la porte restée entrouverte.
- Bonjour, vous voyez, je suis en pleine consultation, répond Alban.
- Docteur Perez, on n'en aura que pour 5 minutes, ce ne sera pas long.
Alban les invite finalement à entrer dans son bureau.
- Je suis l'inspecteur Navarro et voici le lieutenant Carof. Nous enquêtons sur l'un de vos patient, Théo Perrin. Et nous aimerions savoir s'il avait un problème cardiaque.
26 – Bergamote
- Vous savez, je suis lié par le secret médical, Je ne peux pas vous donner des informations comme ça.
- Monsieur Perrin est décédé apparemment d'une crise cardiaque. On veut simplement s'assurer qu'il ne s'agit pas d'autre chose.
La mort d'un patient est toujours un choc. Machinalement, Alban, repousse sa tasse de thé à la bergamote posée sur son bureau.
- Non, Monsieur Perrin n'avait aucun problème cardiaque. C'était un sportif accompli.
27 – Emballé
Elle n'était pas emballée à l'idée de prendre un animal de compagnie. Mais Naira a craqué, elle a fini par adopter le chaton. C'est un petit mâle au pelage fauve et noir qui rappelle celui du tigre.
Instantanément, le nom de Max s'est imposé. Espiègle, joueur, câlin, il lui apporte un peu de réconfort dans son chagrin. Il agit un peu comme un ange gardien. Il semble deviner ses pensées, du moins en partie. Réciproquement, elle arrive à le comprendre.
28 – Mains
Naira déambule sur les pontons du port de plaisance avec Théo, main dans la main. Le soleil levant promet une journée magnifique. Il lui passe le bras sur ses épaules, elle se blottit contre lui et pose la joue sur sa chemise en soie d'une infinie douceur.
- Naira, je vais bientôt partir. Mais je continuerai de veiller sur toi. Je veux que tu sois heureuse.
Le ronronnement d'un moteur de bateau se fait entendre.
29 – Mousse
- Théo, pourquoi partir ? Non...
- Ne t'inquiète pas, tout ira bien.
Sur le voilier prêt à appareiller, un petit mousse de 3 ou 4 ans leur fait un signe de la main. Théo lui répond.
Naira se réveille. Elle sent toujours la chaleur de Théo, le contact soyeux sur sa joue et entend encore le bruit du moteur. Elle ouvre les yeux et aperçoit une boule de douceur lovée contre elle : Max. Il a posé délicatement sa patte sur sa joue et ronronne de bien-être.
30 – Laver
Ce matin, Max a décidé de taquiner son humaine. Pendant qu'elle est occupée à laver sa tasse dans l'évier, il attrape le pompon de son porte-clés avec ses petites mâchoires, traverse le séjour en trottant et file dehors avec son butin.
Paniquée, Naira veux surtout récupérer ses clés. Elle le poursuit en pyjama dans la rue et a juste le temps d'apercevoir son chat s'infiltrer sous le portail d'un voisin au bout de l'allée.
- Max ! Pst-pst-pst !
31 – Savon
Elle court jusqu'au portail et hésite à entrer. Le félin disparaît derrière un buisson.
- Max ! Allez viens ! Maaax ! Tu vas recevoir un savon, je te préviens... Max ! MAAAX !
Un homme contourne le buisson et se présente face à Naira.
- Oui Madame ?
Elle sent ses joues s'empourprer. Tout sourire, ce beau brun aux yeux verts semble ravi de la rencontre. Il lui tend les clés.
- Vous voulez les récupérer ? C'est moi, Max.
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