La danse de Gengis Cohn

La danse de Gengis Cohn

Il y a sans doute des dizaines d'interprétations à faire de La danse de Gengis Cohn et de la manière dont il s'inscrit dans la bibliographie de Romain Gary. Elles sont d'ailleurs faciles à trouver, et pour la plupart, assez intéressantes. Il faut dire que Gary, en plus d'être un écrivain talentueux, est également un personnage fascinant, de par ses origines et son histoire. Quant à La danse de Gengis Cohn, c'est un livre tellement foisonnant, tellement dense, tellement indescriptible qu'il n'est pas étonnant qu'il inspire autant de monde.

J’ai froid dans le dos. Je sens soudain « qu’un danger terrible plane sur ceux de ma race : des nazis qui ne seraient pas antisémites. Vous imaginez un peu le mal que ça peut nous faire, un Hitler qui ne serait pas du tout contre les Juifs, au contraire, qui serait seulement contre les nègres ? Les Allemands ont failli nous avoir. Heureusement qu’ils étaient racistes.

L'histoire part d'une farce. Celle d'un commissaire de police allemand, ancien nazi, hanté sans relâche par l'esprit de l'une de ses victimes, un comique juif. Il hérite de l'enquête autour de la mort de 22 personnes, toutes retrouvées sans pantalons et extatiques.

Pour ma part, j'ai avant tout beaucoup ri à la lecture de cet oeuvre dont l'extravagance m'a surprise. Romain Gary s'est absolument tout autorisé, et pousse l'humour noir dans ses retranchements avec beaucoup de talent. On y découvre, au milieu d'un délire sans retenue, son humanité absolue, sa rage, ses accès de colère contre l'imbécilité, contre la violence systémique. En effet, la farce du début permettra à l'auteur de développer en seconde partie beaucoup plus allégorique, personnifiant la vie et la mort elle-même, tournant autour d'un mauvais goût assumé délicieusement mordant.

Il ne faut pas être intellectuel pour apprécier La danse de Gengis Cohn, ni d'en décortiquer chaque ligne. Je suis sans doute passée à côté de la moitié des références. J'ai pris de plein fouet, en revanche le talent de Gary pour les mots, les excès et les rires.


La danse de Gengis Cohn | Romain Gary | Gallimard/Folio