Le Voleur d'art
Il y a quelque chose de fascinant dans la figure du voleur en série. Stéphane Breitwieser, dont il est question ici, a par exemple commis en 7 ans pas moins de 239 vols dans des musées européens. Comment a-t-il pu mener à bien autant de larcins sans être ne serait-ce que soupçonné ? Que faisait-il d'un si important butin ? Jusqu'où serait-il allé s'il n'avait pas été confondu par la police Suisse alors qu'il a fait l'erreur de revenir sur le lieu de son dernier crime ? Avant tout : qu'est-ce qui peut motiver un homme à accomplir un méfait de telle importance ?
L'appât du gain ? Non. Il n'a jamais revendu les œuvres volées. L'envie de célébrité ? Non. Il n'a jamais revendiqué ses vols, il était même si discret qu'il n'a presque jamais éveillé de soupçons. L'amour alors ? Comme le suggère le sous-titre du livre “une histoire d'amour et de crime” ? En effet, Stéphane a commis la plupart de ses vols avec la complicité de sa compagne de l'époque. Cela semble ne m'a pas convaincu. L'amour de l'art, avant tout ? Est-ce que les œuvres en question étaient irrésistibles ?
Dans ce récit richement documenté, Michael Finkel retrace minutieusement le parcours de ce voleur hors norme, de par le nombre d'œuvres volées, l'efficacité de son mode opératoire et surtout, de par sa personnalité complexe. Il brosse le tableau d'un homme solitaire, vivant dans le grenier de la maison de sa mère, fou amoureux de sa compagne qu'il initie à sa passion illégale. Il détaille toute l'évolution de leur carrière, le perfectionnement de leur technique, à quel point ces activités ont fini par guider l'ensemble de leur vie, jusqu'à la chute. On découvre au fur et à mesure du récit comment ces actes qualifiés d'actes “d'amour” relèvent finalement plutôt d'une profonde obsession, d'un besoin de contrôle, d'un orgueil excessif. Comment ces agissements, loin de rendre heureux qui que ce soit, finissaient par les dévorer entièrement.
Enquête passionnante dans les méandres de personnalités complexes, Le voleur d'art séduit par le sérieux et la soif de comprendre avec laquelle l'auteur a abordé ce cas. Empathique sans être complaisant, il dresse un tableau qui semble le plus fidèle possible d'un homme éternellement insatisfait.
Le Voleur d'art | Michael Finkel | Traduit par Julie Sibony | Marchialy