Rocky, dernier rivage
J'étais très curieuse de lire Rocky, dernier rivage, tant l'accroche me paraissait prometteuse.
Dans un monde semblant post-apocalyptique, 5 ans après une catastrophe ayant apparemment décimé l'humanité, nous découvrons le quotidien aliéné d'une famille fortunée réfugiée depuis le début des événements sur une île privée et vivant en vase clos depuis lors...
Quel sens donner à sa vie quand tout est prévu pour assurer une survie sans effort, mais sans la moindre interaction autre que familiale ? Comment se construire en tant qu'adulte quand on est un adolescent loin de toute vie, élevé en visionnant des films et des séries parlant d'un monde qui n'existe plus ? Comment ne pas perdre la raison, coincés à vie sur une île avec des personnes qu'on finit par détester ? Quelle hiérarchie peut encore être possible quand la civilisation n'est plus ?
Toutes ces interrogations, et bien d'autres, sont brillamment développées dans ce roman de Thomas Gunzig. À partir d'une situation initiale aussi limpide qu'impeccable, il développe rigoureusement la psychologie de ses personnages tout en alimentant l'univers de son récit par de très judicieux flash-back. Véritable huis-clos, Rocky, dernier rivage tient en effet l'essentiel de ses qualités à l'écriture de ses protagonistes. Thomas Gunzig ne fait en effet pas dans la dentelle, nous présentant des individus, certes archétypaux, mais qui semblent pourtant peu éloignés de la réalité. Les adolescents, surtout, sont présentés avec des névroses qui les rendent parfaitement crédibles et qui nous accrochent à leur devenir. Il y a en effet quelque chose de l'ordre de la catastrophe imminente dans l'atmosphère qui se dégage à la lecture tant cette indolence forcée ne semble pouvoir mener que vers un précipice.
Une seule chose est à déplorer dans ce roman : une fin qui ne m'a pas semblé à la hauteur des enjeux : un peu précipitée, un peu évidente. Elle ne gâche pas toutes les qualités du récit, mais laisse un petit goût de déconvenue.
Cela ne m'empêche pas, cependant, de recommander chaudement la lecture de Rocky, dernier rivage, qui reste réussi sur bien des points.
Rocky, dernier rivage | Thomas Gunzig | Au Diable Vauvert