Un Spicilège

Ma Tempête

Ma Tempête est un livre dont j'ai entendu parler dans une newsletter et dont les thématiques m'ont tout de suite paru intéressantes.
David est un metteur en scène de théâtre qui, alors qu'il se retrouve sans activité à la suite de l'échec de son dernier projet, est dans l'obligation de garder sa fille, la crèche étant en grève. Il se décide donc, lors de cette improbable journée, à lui raconter sa vision de La Tempête de Shakespeare.
Je ne m'attendais pas, cependant, à être autant touchée par ce livre que j'ai trouvé particulièrement juste, vrai, sincère, empli d'inspiration et de passion.

Il brasse en effet beaucoup de thématiques, qui trouvent écho dans l'œuvre de Shakespeare. Le parallèle est rapidement fait entre le metteur en scène David et le magicien Prospero, personnage de La Tempête coincé sur une île avec sa fille et grand manipulateur des différents protagonistes de la pièce. On est d'ailleurs plongé dans la sincère admiration et la connaissance que David a de Shakespeare, aussi bien l'artiste que son œuvre. Cette proximité ira jusqu'à inspirer David et sa femme pour le prénom de leur fille, Miranda, identique à celle de Prospero. Comme lui aussi, David est en échec et en rivalité avec son frère.

Après le drame, il y a la tragédie. Quand on dépasse le drame, on ne souffre plus. La tragédie, c'est la joie. Dans le drame on peut sauver quelque chose, dans la tragédie il n'y a plus d'espoir. C'est au-delà de la douleur : un abandon, un lâcher-prise.

Parallèlement au petit théâtre des hommes, Éric Pessan amorce également une intense réflexion sur l'art, sa nature profonde, sa fonction fondamentale dans la société, son utilité, sa valeur intrinsèque qui s'oppose au besoin toujours plus pressant de rentabilité. Il nous dit tout des difficultés que rencontrent les milieux artistiques, de la précarité d'un statut d'intermittent de plus en plus remis en cause par les institutions car devenu encombrant.

On ne peut pas aimer l'art et les artistes sans être touché par Ma Tempête, par sa poésie infinie et sa vérité sans filtre. Parfait équilibre entre ce qui nous fait rêver, réfléchir, évoluer dans l'art, et ce qui le rend aussi fragile, nous convaincant de l'obligation qui est la nôtre de le soutenir et de le protéger.


Ma Tempête | Éric Pessan | Aux Forges de Vulcain

Le dernier théorème de Fermat

La théorie des nombres, cette discipline mathématique qui s'intéresse aux propriétés des nombres, a quelque chose de fascinant. Je peux très facilement me perdre dans les méandres des contenus qui lui sont consacrés, sans doute car c'est l'une des branches des mathématiques qui semblent les plus accessibles aux non-mathématiciens, ses énoncés et ses théorèmes étant relativement faciles à comprendre.
Le dernier théorème de Fermat, par exemple qui occupe la place centrale de ce livre, s'énonce facilement :

Il n'existe pas de nombres entiers strictement positifs x, y et z tels que :
xn+yn=zn
dès que n est un entier strictement supérieur à 2.

Pour qui se rappelle vaguement de Pythagore, cela semble familier et un profane imaginerait sans doute que cela ne doit pas être bien compliqué à démontrer. Pourtant, sa résolution occupera les mathématiciens (certains jusqu'à l'obsession) pendant plus de 3 siècles.
C'est ce qui nous est brillamment conté par Simon Singh dans ce livre palpitant. On y retrouve tout ce qui ferait le sel d'une enquête policière : des indices, des hypothèses, des fausses pistes, des revirements de situations... Une histoire passionnante, parsemée de portraits des grands noms des mathématiques ayant travaillé sur le sujet.
J'ai lu nombre de livres de vulgarisation, d'histoire ou d'épistémologie autour des mathématiques, mais aucun n'a réussi à ce point à me faire entrevoir la portée de la recherche mathématique. Son but, son importance, ses mécanismes. Le Dernier Théorème de Fermat est une plongée captivante dans ses coulisses, doublée d'une formidable histoire de l'évolution de la discipline. Il est vertigineux de se rendre compte des conséquences et implications de ce simple théorème et impossible de ne pas être admirative de ceux qui ont fait évoluer sa compréhension.
Simon Singh parvient sans effort à rendre tous ces sujets digestes, et, même s'il faut évidemment une certaine appétence pour le sujet, le livre est particulièrement accessible.
Sa lecture constitue un authentique apprentissage, non sans être un véritable plaisir.


Le dernier théorème de Fermat | Simon Singh | Traduit par Gérald Messadié | Collection Pluriel

Délivrance De Délivrance, je connaissais déjà l'adaptation cinématographique, signée John Boorman, une vraie, grande et belle claque cinématographique comme j'en ai rarement eu, comme souvent quand on regarde un film aussi puissant très jeune.
J'ai d'ailleurs eu l'occasion il y a quelques mois de le revoir sur grand écran, moi qui n'avais jamais eu cette chance (je vous en parle ici).
C'est à ce moment que j'ai appris que le film était l'adaptation d'un roman signé James Dickey, auteur qui semble avoir insinué à l'époque auprès de l'équipe de tournage que tout ce qui y était relaté lui était réellement arrivé.

Des propos particulièrement choquants quand on connaît un minimum l'histoire de cette descente de rivière en canoë presque improvisée par 4 citadins à la recherche de sensations authentiques qui tournera tout bonnement au cauchemar quand ils seront confrontés à la rudesse des éléments et de la population locale.

J'étais à la fois curieuse et remplie d'appréhension quand il s'est agi de découvrir la façon dont certaines scènes avaient été pensées par l'auteur (la scène du banjo, la scène de l'escalade et puis... LA scène...). C'est avec surprise que je me suis rendue compte que l'adaptation était finalement particulièrement fidèle à ce roman d'une force inouïe.
J'y ai tout retrouvé : la sensation d'enfermement émanant de la profondeur des gorges, la puissance et le chaos qui se dégagent de cette rivière sauvage, la terreur, la paranoïa...
L'écriture de James Dickey a une force évocatrice rare. Chaque ligne est imprégnée de la puissante image des paysages, de l'odeur entêtante de la végétation, du bruit parfois envoûtant, parfois effroyable de l'eau qui s'écoule.
Dans cette atmosphère humide et étouffante, il développe une terrible intrigue, dont le suspense maîtrisé nous entraîne peu à peu vers l'épouvante, questionnant sans cesse la psychologie de ses héros, qui sont tous d'une ambiguïté dérangeante.
Summum du roman survivaliste, Délivrance nous entraîne à la frontière de l'humanité, quand la morale cède à l'instinct.

Sa lecture fut asphyxiante et terriblement marquante.


Délivrance | James Dickey | Traduit par Jacques Mailhos | Éditions Gallmeister

La Vieille Anglaise et le continent

Superbe bande dessinée adaptée d'un court roman (d'une longue nouvelle ?) de Jeanne-A Debats, La vieille anglaise et le continent est une ode à la nature, à l'activisme, au féminisme et bien plus encore...
La vieille anglaise en question, c'est Ann Kelvin, une militante écologiste qui, alors qu'elle est au seuil de sa vie, accepte la proposition de l'un de ses anciens élèves : transférer son esprit dans le corps d'un cachalot, pour pouvoir agir une dernière fois en faveur des animaux marins victimes de trafic.

L'immensité des océans qui servent de décor à cette histoire est le pendant de l'immensité des thèmes sociétaux abordés dans l'intrigue, avec finesse et réflexion. On sent immédiatement à quel point tous ces sujets tiennent au cœur de l'auteur. Ceci complète parfaitement l'immense poésie et la délicatesse certaine qui baignent l'ensemble du récit, parfaitement sublimées par la mise en images somptueuse de Stefano Martino.

Un album tout en élégance, au sens profond et source de belles réflexions.


La Vieille Anglaise et le continent | Scénario de Valérie Mangin | Dessins de Stefano Martino | Éditions Drakoo

Délivrez-nous du bien

Quelle claque que ce roman qui restera malheureusement le seul de Joan Samson.
Paru en 1976, il conte l'histoire de l'arrivée dans une petite ville rurale du New Hampshire d'un drôle de commissaire-priseur venu de la ville. Aidé des forces de l'ordre, il commence à organiser des ventes aux enchères avec les biens dont les habitants, parmi lesquels la famille Moore, acceptent de se défaire “pour la bonne cause” : donner des moyens à la sécurité et au développement de la ville. Les Moore se rendent pourtant compte que le nouveau maître de la ville ne compte pas s'arrêter de sitôt, alors que tout le monde semble pris dans un effroyable engrenage.

Il m'a été très difficile de lâcher Délivrez-nous du bien avant la fin tant la mécanique lentement mise en place est efficace. Propulsé dans l'impasse que les Moore semblent obligés d'emprunter, il est difficile de reprendre son souffle tant on a l'impression que le mur va bientôt être percuté.

Perly, figé, voyait l'agitation se répandre.
“Souvenez-vous seulement de ceci, dit-il enfin d'une voix caverneuse qui tranchait nettement dans la confusion. Tout ce que j'ai fait, vous m'avez laissé le faire.”

Joan Samson décrit parfaitement le phénomène d'emprise, en plongeant profondément dans la psychologie des personnages des Moore, oscillant tout au long du récit entre effroi, soumission et rébellion. Satellites de cette famille en détresse, les autres personnages, tout aussi justes, complètent les points de vue de réactions différentes.

Furieuse dénonciation du capitalisme, Délivrez-nous du bien en décrit tout à fait les mécanismes, tout en détaillant avec violence le choc des valeurs entre ville et ruralité. Magistral de bout en bout.


Délivrez-nous du bien | Joan Samson | Traduit par Laurent Vannini | Monsieur Toussaint Louverture

Avec la permission de Gandhi

J'ai acheté Avec la permission de Gandhi à la boutique du Musée du Quai Branly, après la visite de l'exposition Bollywood Superstars centrée sur l'évolution du cinéma indien et plus largement, sur celle de l'Inde. Je me suis alors rendue compte que je connaissais peu l'histoire de ce pays qui est pourtant particulièrement dense. J'ai vu dans la lecture de ce livre une manière de découvrir d'une autre façon la période des Indes Britanniques.

Le roman se situe en effet en 1921 et met en scène le capitaine Sam Wyndham, un Britannique travaillant pour la police impériale de Calcutta, ainsi que son jeune collègue indien Sat Banerjee. Confrontés à une série de meurtres mystérieux, ils dirigeront l'enquête alors que la ville est en proie à des agitations ourdies par les soutiens de Gandhi, partisans de l'indépendance du pays.
Avec la permission de Gandhi est un polar classique, plutôt efficace, dont l'atout majeur, outre son personnage principal, est sa représentation détaillée, à travers les événements et les rapports humains, des grands enjeux et du tumulte qui secouait la société indienne de cette période. En effet, à la fin de la Première Guerre Mondiale, l'Inde, appauvrie par les taxes liées à la guerre, voit sa société agitée par un élan de contestation qui aboutit à de longs mouvements de grève ainsi que des émeutes, durement réprimandées par les autorités.

Plonger dans cette atmosphère particulièrement bien mise en avant par l'auteur fut passionnante. Je me suis également beaucoup intéressée à Sam Wyndham, héros torturé possédant de nombreuses facettes, à la merci de démons et d'injonctions contradictoires, à la profondeur d'écriture admirable. Abir Mukherjee bénéficie en effet d'un talent certain pour l'élaboration de ses personnages, chacun des protagonistes du roman ayant une densité très appréciable.
Roman profondément documenté et documentaire, Avec la permission de Gandhi fut une lecture captivante me donnant envie de découvrir plus d'aventures du capitaine Wyndham.


Avec la permission de Gandhi | Abir Mukherjee | Traduit par Fanchita Gonzalez Batlle | Gallimard / Folio policier

Invincible

Je le redoutais, ce court-métrage.
De toute la collection “En lice vers les Oscars 2024” sur Arte.tv, c'est celui que j'ai regardé en dernier.

Parce qu'il était le plus long (29 minutes).
Parce que c'était le seul en prises de vue réelles quand tous les autres sont des courts-métrages d'animation. L'animation, c'est plus facile, c'est moins concret, ça touche souvent moins.
Parce que l'image d'illustration, celle du jeune acteur en herbe Léokim Beaumier-Lépine, m'inspirait déjà une infinie tristesse. Les histoires d'adolescents me bouleversent. Il faut dire que j'en ai deux qui vivent sous mon toit.
Parce qu'en lisant le synopsis, basé sur l'histoire vraie de Marc-Antoine Bernier, je me doutais que j'en sortirais bouleversée.

J'avais raison. Il faut croire que je me connais bien.
Invincible est un drame sauvage, une histoire poignante. Grave, mais paradoxalement d'une réelle beauté.
Il se passe au Canada, dans la vie d'un jeune garçon dont les envies irrépressibles de liberté se heurtent à l'internement dans un centre d'accueil fermé pour mineurs.

Il repose surtout sur le talent de ses acteurs, l'acteur principal en tête. Léokim Beaumier-Lépine est en effet d'une justesse incroyable quand on sait qu'il s'agit de son premier rôle, il incarne le personnage avec une vérité qui ne trompe pas.
La réalisation est plus classique, le travail sur la couleur vraiment soigné et certains plans, évocateurs, sont déchirants.

Intéressez-vous à l'histoire de ce film, aux circonstances dans lesquelles il a été réalisé, il n'en devient que plus poignant encore.


Invincible | Vincent René-Lortie | 2022

Lapin maudit

Dans ce recueil de 10 nouvelles, la Coréenne Chung Bora nous entraîne à la lisière du fantastique, dans un monde inattendu et mélancolique. Un monde dans lequel une étrange tête peut tout à coup sortir des toilettes pour discuter, un monde où une femme tombe enceinte d'avoir pris trop longtemps la pilule, un monde ou un renard blessé peut saigner de l'or...

Si je peux faire un vœu
Je voudrais être heureux
Mais alors juste un peu
Si je suis trop heureux
Ma peine va me manquer

Plonger dans l'univers de Chung Bora est une sacrée expérience. Puisant ses inspirations dans les mythes coréens, mais teintant le tout d'une surprenante modernité, elle commence chacune de ses nouvelles comme une petit fable légère, pour la faire basculer au fil des lignes vers des récits souvent très noirs, puissants, dérangeants. Il émane de ce recueil une profonde tristesse, une telle étrangeté que l'on se sent souvent désemparé, ne sachant comment réagir face à des événements impossibles à appréhender.

Grâce à son écriture claire et franche, Chung Bora est capable de mettre en place une situation en quelques mots, de nous mettre dans une atmosphère en quelques phrases, de faire basculer le ton d'un récit d'une ligne à l'autre.

Ce recueil est sans aucun doute parmi les textes les plus étranges qu'il m'ait été donné de lire. Singulièrement fascinant, il m'a happée en quelques pages et je ne l'ai quitté qu'à regret, en me demandant un moment encore qu'étais-je bien en train de lire.


Lapin maudit | Chung Bora | Traduit par Han Yumi et Hervé Péjaudier | Matin Calme

Volna

Avec Volna, Christophe Siébert ouvre donc le cycle Après le black-out, toujours situé dans l'univers de Mertvecgorod, mais chez un nouvel éditeur. On y retrouve la RIM dans une temporalité différente sans que cela ne change sa nature profonde de matriarche-ogresse prête à dévorer ses enfants.

L'intrigue de Volna tourne autour d'un singe capucin électroniquement augmenté innocemment récupéré par une jeune femme. Consciente de son prix au marché noir, et résolument décidée à le revendre, elle se lance dans une fuite avec son colocataire tandis qu'ils se retrouvent recherchés dans toute la ville par ceux que la perte de cet animal dérange.

Dans ce court roman percutant, Christophe Siébert s'attelle cette fois-ci à nous offrir une course-poursuite rythmée, en y mêlant violence et corruption, quand la dimension politique se heurte aux ambitions individuelles.
Dans l'univers de Mertvecgorod, les choses les plus crasses deviennent tellement familières que rien ne parvient plus à choquer, voire même à interpeller, et je me suis souvent surprise par mon détachement à la lecture. Anesthésiée par le sordide, habituée à l'infect, au bout de 4 romans, il devient difficile de trouver la lumière et l'étrange insensibilisation qu'exerce Mertvecgorod devient hypnotique.
La plume de Siébert est cependant tellement évocatrice qu'elle parvient sans effort à m'atteindre, me ramenant au cœur de l'intrigue, au cœur du spectacle auquel j'avais presque l'impression de prendre part. Volna est de ces romans qu'on a l'impression de lire précipitamment, pressé par une urgence qu'on a du mal à définir, mais qui ne nous quitte à peine qu'une fois le dernier mot imprimé sur la rétine. Reste le mal-être, une vague impression de dégoût.

Un livre à lire de bonne humeur. Peut-être attendre le printemps.


Volna | Christophe Siébert | Mnémos/Label Mu

Humanis

J'avais envie de renouer avec une saga, avec de la science-fiction, avec du space opéra. Ce nouveau roman de Stéphane Desienne tombait donc à point nommé. Je connais Stéphane depuis longtemps et je sais qu'il excelle dans ce registre. Je trouve aussi qu'il livre des œuvres de plus en plus abouties et ce dernier opus le confirme tout à fait.

Récit au temps long, Humanis nous narre une histoire de conquête spatiale, quand l'humanité rencontre après des millénaires une espèce qu'elle a elle-même créée et qu'elle pensait éteinte : les humanis, génétiquement modifiés pour s'adapter à la vie en apesanteur.

Entamant son roman comme un techo-thriller, Stéphane Desienne délaisse très vite les soupçons de ce prologue pour déployer une véritable épopée, en laissant s'installer une intrigue millénaire, dans un monde dans lequel l'humanité n'a vaincu les distances qu'en figeant le temps. La dimension temporelle allongée à l'extrême permet de se rappeler, en comparaison, de la fragilité et l'insignifiance d'une vie humaine.
Si les héros sont éphémères, les enjeux sont colossaux et l'auteur parvient tout à fait à retranscrire les perspectives ouvertes par la conquête de nouveaux espaces. Le choc civilisationnel de la rencontre avec une autre humanité et les décisions qui en découlent formant le cœur passionnant de l'intrigue.

L'écriture de Stéphane Desienne s'épanouit franchement pour donner corps et crédibilité à un monde vaste, riche et parfaitement cohérent. Il est dans son élément, et ça se sent. Il prend le temps d'établir une intrigue s'étirant dans le temps, dont l'essence même nécessitait un large espace qu'il a su très bien lui forger.

Si j'ose le dire ainsi, Humanis est un roman infiniment humaniste, dans lequel pointe, sous la crasse réalité, un optimisme touchant profondément à la lecture.


Humanis | Stéphane Desienne | Éditions du 38