Un Spicilège

L'assassin habite au 21

En feuilletant les premières pages de cet ouvrage, trouvé en occasion, j'ai découvert que ce grand classique paru en 1939, adapté avec succès au cinéma par Henri-George Clouzot en 1942 et dont l'intrigue prend part au cœur de Londres a été écrit par un auteur belge, Stanislas-André Steeman. Auteur prolifique s'il en est, puisqu'il signe une quarantaine de romans policiers, dont une douzaine ont été adaptés au cinéma (citons Le dernier des six, L'ennemi sans visage ou Quai des orfèvres, entre autres).

En me plongeant dans cette lecture, sans doute également influencée par mes souvenirs de la collection mythique du Masque, c'est bien dans un très efficace “Whodunit” que je me suis retrouvée avec délectation.
Tout y est : de la mise en place de l'énigme à l'enquête semée de fausses pistes et de rebondissements, jusqu'aux révélations finales, aussi inattendues (enfin, je m'en doutais un peu tout de même) que théâtrales.
L'auteur lui-même insiste sur cet aspect des choses dans un aparté explicite dans lequel il invite les lecteurs à trouver la solution avant qu'elle ne soit donnée.

J'ai pris un plaisir fou à me lancer dans cette histoire réjouissante, qui m'a rappelé tant de joies de lecture de jeunesse, quand je dévorais ce type de roman, conseillée par ma grand-mère.
L'assassin habite au 21 ne vole pas sa réputation : sa construction est exemplaire, ses personnages sont percutants et le style d'écriture, très sûr et direct, en fait une lecture saisissante.

Un véritable refuge nostalgique, qui fait du bien.


L'assassin habite au 21 | Stanislas-André Steeman | Librairie des Champs Élysées

Le temps d'un souffle, je m'attarde

Je ne remercierai jamais assez les éditions Le passager clandestin pour leur prodigieuse collection Dyschroniques, dirigée par Dominique Bellec, dont je suis férue. Elle permet en effet de (re)découvrir d'anciennes nouvelles d'anticipation, écrites par des grands noms de l'imaginaire, s'interrogeant sur l'avenir de l'humanité. Ce fameux écrin m'a permis de découvrir un texte que j'ignorais de cet auteur si cher à mon cœur qu'est Roger Zelazny.
Parue en 1966, au début de sa carrière, Le temps d'un souffle, je m'attarde narre l'histoire d'une intelligence artificielle, Gel, chargée, dans un avenir lointain de veiller sur une Terre sur laquelle l'humanité n'est plus qu'un lointain souvenir. Pris d'intérêt pour les créations humaines, fasciné par la complexité qui se dégage de ces artefacts, Gel se met en tête de devenir lui-même humain, et se lance pour cela dans une quête de connaissance et de sens.

Le temps d'un souffle, je m'attarde est une nouvelle aussi douce que son titre le laisse penser. On y retrouve déjà les thèmes qui seront au cœur des textes de l'auteur tout au long de sa carrière : les luttes de pouvoir, et surtout l'humanité, l'immortalité. Cependant, ces derniers thèmes sont dans cette nouvelle abordés selon un prisme différent de ceux que j'ai eu l'habitude de lire. En effet, si on retrouve souvent dans ses écrits des histoires d'homme accédant à l'omniscience ou à l'immortalité, il est question ici de l'inverse : une IA, presque omnisciente et immortelle, cherche à trouver son humanité.

D'une poésie folle et empreint d'une nostalgie certaine, Le temps d'un souffle, je m'attarde est un récit fort, qui questionne ce qui fait l'essence même de l'humain ; un mélange de récit d'aventure, d'apprentissage et de conte philosophique. L'écriture, particulièrement empathique, fait que l'on s'attache très rapidement à ce drôle de personnage principal, dont la quête pleine de sens fait écho à nos propres interrogations.

Un texte qui m'a semblé original dans l'œuvre de Roger Zelazny, prémices de ses futurs grands travaux tout en ayant une singularité propre.


Le temps d'un souffle, je m'attarde | Roger Zelazny | Traduit par Jean Bailhache | Le passager clandestin/dyschroniques

Comment être parfait

Face aux questions éthiques qui jalonnent presque tous les aspects de notre vie, qu'en dit la philosophie morale ? Quels sont les concepts essentiels développés par nos grands penseurs sur ce sujet ? Comment les appliquer à nos situations quotidiennes ?
Michael Schur (qui est apparemment scénariste et showrunner de plusieurs séries télé, dont The Good Place, ce qui, à présent que je le sais, me semble plein de sens) s'attaque à ces sujets épineux et réussi l'exploit de faire de son livre un véritable précis de vulgarisation philosophique, bien loin du manuel de développement personnel avec lequel j'avais très peur de me retrouver.

Pour chaque chapitre, il part d'une situation du quotidien parfois courante, parfois loufoque, parfois profonde (Dois-je dire à mon amie que je trouve sa robe hideuse ? Puis-je frapper mon ami sans raison ? Puis-je lire le livre d'un auteur raciste ?) et introduit les concepts clés d'un courant de la philosophie morale : l'utilitarisme de Bentham, la déontologie de Kant, l'objectivisme de Rand, et bien d'autres. En passant les différentes situations au prisme de tous ces penseurs, il en tire des conclusions qu'il sera libre au lecteur de suivre ou non.
Il n'est en effet pas question ici de faire une quelconque leçon de morale, mais uniquement de présenter les clés que certains philosophes ont mis à notre disposition.

L'ouvrage aurait pu sembler rébarbatif, ce n'est sans compter sur les talents certains de vulgarisation de Michael Schur et son immense sens de l'humour, qui font de ce livre une parfaite introduction au sujet.


Comment être parfait | Michael Schur | Traduit par Maxime Berrée | Philosophie Magazine Editeur

Le Gaffeur

Merci aux Éditions L'échappée de faire revivre des grands textes de fiction politique souvent oubliés dans leur formidable collection lampe-tempête. Absolument tous les livres de cette collection ont basculé dans ma liste de souhaits. Merci aussi pour le formidable travail de conception faisant en plus de ce roman un objet magnifique.
L'auteur, c'est Jean Malaquais, un juif polonais qui écrira pourtant en français après avoir quitté la Pologne pour la France, en 1925, alors qu'il n'avait que 17 ans. Il sera poussé vers l'écriture par André Gide et gagnera le prix Renaudot en 1939 pour son premier roman, Les Javanais, que j'ai bien l'intention de lire aussi.
Dans Le Gaffeur, il nous conte l'étrange histoire de Javelin, qui, dans une société dystopique, rentre un soir chez lui pour trouver l'appartement qu'il avait quitté le matin apparemment occupé depuis longtemps par des inconnus. Ne parvenant plus à joindre sa femme semblant inaccessible, son identité paraît peu à peu se dissoudre dans les rouages d'une administration absurde, décidée à le faire disparaître sans qu'il ne comprenne pourquoi.

Long plaidoyer contre le totalitarisme, le conformisme, pointant du doigt l'absurdité d'une bureaucratie aveugle et destructrice, ce roman est à la fois ironique et parfaitement terrifiant. La société qui y est dépeinte se fait de plus en plus écrasante, déterminée à faire taire les voix dissonantes, au fur et à mesure de la progression d'un récit qui penche petit à petit vers le drame. Tout y est gris, moche, oppressant. Au milieu de ce sinistre, seuls quelques personnages permettent de sortir de l'ombre.

Les dossiers, une fois en route, circulaient de leur propre chef, mais on n'en connaissait ni la provenance, ni la destination. L'ignorance, au demeurant, était obligatoire; c'est elle qui permettait d'accomplir son travail sans y mêler des sentiments ou des émotions qui en eussent faussé la marche. Il était même défendu de se faire une opinion personnelle, source inévitable de préjugés et de partialité. Le produit, si l'on veut, passait de la fabrication au consommateur sans être pollué. À ce point de vue l'organisation était parfaite, elle assurait le maximum d'hygiène.

Ode à l'anti-conformisme, Le Gaffeur est un récit révolutionnaire de part sa profonde modernité. Un juste miroir des angoisses contemporaines que l'on retrouve déjà impeccablement décrites et dénoncées.
La portée politique du texte est parfaitement mise en valeur par l'appareil critique propre à la collection, le texte de Geneviève Nakach, surtout, qui a soutenu une thèse sur Jean Malaquais, apporte un éclairage passionnant.

Quand un grand roman rencontre l'éditeur parfait pour le mettre en valeur...


Le Gaffeur | Jean Malaquais | L'échappée

Collection lampe-tempête Préface de Sebastian Cortés Postface de Geneviève Nakach

Ma Tempête

Ma Tempête est un livre dont j'ai entendu parler dans une newsletter et dont les thématiques m'ont tout de suite paru intéressantes.
David est un metteur en scène de théâtre qui, alors qu'il se retrouve sans activité à la suite de l'échec de son dernier projet, est dans l'obligation de garder sa fille, la crèche étant en grève. Il se décide donc, lors de cette improbable journée, à lui raconter sa vision de La Tempête de Shakespeare.
Je ne m'attendais pas, cependant, à être autant touchée par ce livre que j'ai trouvé particulièrement juste, vrai, sincère, empli d'inspiration et de passion.

Il brasse en effet beaucoup de thématiques, qui trouvent écho dans l'œuvre de Shakespeare. Le parallèle est rapidement fait entre le metteur en scène David et le magicien Prospero, personnage de La Tempête coincé sur une île avec sa fille et grand manipulateur des différents protagonistes de la pièce. On est d'ailleurs plongé dans la sincère admiration et la connaissance que David a de Shakespeare, aussi bien l'artiste que son œuvre. Cette proximité ira jusqu'à inspirer David et sa femme pour le prénom de leur fille, Miranda, identique à celle de Prospero. Comme lui aussi, David est en échec et en rivalité avec son frère.

Après le drame, il y a la tragédie. Quand on dépasse le drame, on ne souffre plus. La tragédie, c'est la joie. Dans le drame on peut sauver quelque chose, dans la tragédie il n'y a plus d'espoir. C'est au-delà de la douleur : un abandon, un lâcher-prise.

Parallèlement au petit théâtre des hommes, Éric Pessan amorce également une intense réflexion sur l'art, sa nature profonde, sa fonction fondamentale dans la société, son utilité, sa valeur intrinsèque qui s'oppose au besoin toujours plus pressant de rentabilité. Il nous dit tout des difficultés que rencontrent les milieux artistiques, de la précarité d'un statut d'intermittent de plus en plus remis en cause par les institutions car devenu encombrant.

On ne peut pas aimer l'art et les artistes sans être touché par Ma Tempête, par sa poésie infinie et sa vérité sans filtre. Parfait équilibre entre ce qui nous fait rêver, réfléchir, évoluer dans l'art, et ce qui le rend aussi fragile, nous convaincant de l'obligation qui est la nôtre de le soutenir et de le protéger.


Ma Tempête | Éric Pessan | Aux Forges de Vulcain

Le dernier théorème de Fermat

La théorie des nombres, cette discipline mathématique qui s'intéresse aux propriétés des nombres, a quelque chose de fascinant. Je peux très facilement me perdre dans les méandres des contenus qui lui sont consacrés, sans doute car c'est l'une des branches des mathématiques qui semblent les plus accessibles aux non-mathématiciens, ses énoncés et ses théorèmes étant relativement faciles à comprendre.
Le dernier théorème de Fermat, par exemple qui occupe la place centrale de ce livre, s'énonce facilement :

Il n'existe pas de nombres entiers strictement positifs x, y et z tels que :
xn+yn=zn
dès que n est un entier strictement supérieur à 2.

Pour qui se rappelle vaguement de Pythagore, cela semble familier et un profane imaginerait sans doute que cela ne doit pas être bien compliqué à démontrer. Pourtant, sa résolution occupera les mathématiciens (certains jusqu'à l'obsession) pendant plus de 3 siècles.
C'est ce qui nous est brillamment conté par Simon Singh dans ce livre palpitant. On y retrouve tout ce qui ferait le sel d'une enquête policière : des indices, des hypothèses, des fausses pistes, des revirements de situations... Une histoire passionnante, parsemée de portraits des grands noms des mathématiques ayant travaillé sur le sujet.
J'ai lu nombre de livres de vulgarisation, d'histoire ou d'épistémologie autour des mathématiques, mais aucun n'a réussi à ce point à me faire entrevoir la portée de la recherche mathématique. Son but, son importance, ses mécanismes. Le Dernier Théorème de Fermat est une plongée captivante dans ses coulisses, doublée d'une formidable histoire de l'évolution de la discipline. Il est vertigineux de se rendre compte des conséquences et implications de ce simple théorème et impossible de ne pas être admirative de ceux qui ont fait évoluer sa compréhension.
Simon Singh parvient sans effort à rendre tous ces sujets digestes, et, même s'il faut évidemment une certaine appétence pour le sujet, le livre est particulièrement accessible.
Sa lecture constitue un authentique apprentissage, non sans être un véritable plaisir.


Le dernier théorème de Fermat | Simon Singh | Traduit par Gérald Messadié | Collection Pluriel

Délivrance De Délivrance, je connaissais déjà l'adaptation cinématographique, signée John Boorman, une vraie, grande et belle claque cinématographique comme j'en ai rarement eu, comme souvent quand on regarde un film aussi puissant très jeune.
J'ai d'ailleurs eu l'occasion il y a quelques mois de le revoir sur grand écran, moi qui n'avais jamais eu cette chance (je vous en parle ici).
C'est à ce moment que j'ai appris que le film était l'adaptation d'un roman signé James Dickey, auteur qui semble avoir insinué à l'époque auprès de l'équipe de tournage que tout ce qui y était relaté lui était réellement arrivé.

Des propos particulièrement choquants quand on connaît un minimum l'histoire de cette descente de rivière en canoë presque improvisée par 4 citadins à la recherche de sensations authentiques qui tournera tout bonnement au cauchemar quand ils seront confrontés à la rudesse des éléments et de la population locale.

J'étais à la fois curieuse et remplie d'appréhension quand il s'est agi de découvrir la façon dont certaines scènes avaient été pensées par l'auteur (la scène du banjo, la scène de l'escalade et puis... LA scène...). C'est avec surprise que je me suis rendue compte que l'adaptation était finalement particulièrement fidèle à ce roman d'une force inouïe.
J'y ai tout retrouvé : la sensation d'enfermement émanant de la profondeur des gorges, la puissance et le chaos qui se dégagent de cette rivière sauvage, la terreur, la paranoïa...
L'écriture de James Dickey a une force évocatrice rare. Chaque ligne est imprégnée de la puissante image des paysages, de l'odeur entêtante de la végétation, du bruit parfois envoûtant, parfois effroyable de l'eau qui s'écoule.
Dans cette atmosphère humide et étouffante, il développe une terrible intrigue, dont le suspense maîtrisé nous entraîne peu à peu vers l'épouvante, questionnant sans cesse la psychologie de ses héros, qui sont tous d'une ambiguïté dérangeante.
Summum du roman survivaliste, Délivrance nous entraîne à la frontière de l'humanité, quand la morale cède à l'instinct.

Sa lecture fut asphyxiante et terriblement marquante.


Délivrance | James Dickey | Traduit par Jacques Mailhos | Éditions Gallmeister

La Vieille Anglaise et le continent

Superbe bande dessinée adaptée d'un court roman (d'une longue nouvelle ?) de Jeanne-A Debats, La vieille anglaise et le continent est une ode à la nature, à l'activisme, au féminisme et bien plus encore...
La vieille anglaise en question, c'est Ann Kelvin, une militante écologiste qui, alors qu'elle est au seuil de sa vie, accepte la proposition de l'un de ses anciens élèves : transférer son esprit dans le corps d'un cachalot, pour pouvoir agir une dernière fois en faveur des animaux marins victimes de trafic.

L'immensité des océans qui servent de décor à cette histoire est le pendant de l'immensité des thèmes sociétaux abordés dans l'intrigue, avec finesse et réflexion. On sent immédiatement à quel point tous ces sujets tiennent au cœur de l'auteur. Ceci complète parfaitement l'immense poésie et la délicatesse certaine qui baignent l'ensemble du récit, parfaitement sublimées par la mise en images somptueuse de Stefano Martino.

Un album tout en élégance, au sens profond et source de belles réflexions.


La Vieille Anglaise et le continent | Scénario de Valérie Mangin | Dessins de Stefano Martino | Éditions Drakoo

Délivrez-nous du bien

Quelle claque que ce roman qui restera malheureusement le seul de Joan Samson.
Paru en 1976, il conte l'histoire de l'arrivée dans une petite ville rurale du New Hampshire d'un drôle de commissaire-priseur venu de la ville. Aidé des forces de l'ordre, il commence à organiser des ventes aux enchères avec les biens dont les habitants, parmi lesquels la famille Moore, acceptent de se défaire “pour la bonne cause” : donner des moyens à la sécurité et au développement de la ville. Les Moore se rendent pourtant compte que le nouveau maître de la ville ne compte pas s'arrêter de sitôt, alors que tout le monde semble pris dans un effroyable engrenage.

Il m'a été très difficile de lâcher Délivrez-nous du bien avant la fin tant la mécanique lentement mise en place est efficace. Propulsé dans l'impasse que les Moore semblent obligés d'emprunter, il est difficile de reprendre son souffle tant on a l'impression que le mur va bientôt être percuté.

Perly, figé, voyait l'agitation se répandre.
“Souvenez-vous seulement de ceci, dit-il enfin d'une voix caverneuse qui tranchait nettement dans la confusion. Tout ce que j'ai fait, vous m'avez laissé le faire.”

Joan Samson décrit parfaitement le phénomène d'emprise, en plongeant profondément dans la psychologie des personnages des Moore, oscillant tout au long du récit entre effroi, soumission et rébellion. Satellites de cette famille en détresse, les autres personnages, tout aussi justes, complètent les points de vue de réactions différentes.

Furieuse dénonciation du capitalisme, Délivrez-nous du bien en décrit tout à fait les mécanismes, tout en détaillant avec violence le choc des valeurs entre ville et ruralité. Magistral de bout en bout.


Délivrez-nous du bien | Joan Samson | Traduit par Laurent Vannini | Monsieur Toussaint Louverture

Avec la permission de Gandhi

J'ai acheté Avec la permission de Gandhi à la boutique du Musée du Quai Branly, après la visite de l'exposition Bollywood Superstars centrée sur l'évolution du cinéma indien et plus largement, sur celle de l'Inde. Je me suis alors rendue compte que je connaissais peu l'histoire de ce pays qui est pourtant particulièrement dense. J'ai vu dans la lecture de ce livre une manière de découvrir d'une autre façon la période des Indes Britanniques.

Le roman se situe en effet en 1921 et met en scène le capitaine Sam Wyndham, un Britannique travaillant pour la police impériale de Calcutta, ainsi que son jeune collègue indien Sat Banerjee. Confrontés à une série de meurtres mystérieux, ils dirigeront l'enquête alors que la ville est en proie à des agitations ourdies par les soutiens de Gandhi, partisans de l'indépendance du pays.
Avec la permission de Gandhi est un polar classique, plutôt efficace, dont l'atout majeur, outre son personnage principal, est sa représentation détaillée, à travers les événements et les rapports humains, des grands enjeux et du tumulte qui secouait la société indienne de cette période. En effet, à la fin de la Première Guerre Mondiale, l'Inde, appauvrie par les taxes liées à la guerre, voit sa société agitée par un élan de contestation qui aboutit à de longs mouvements de grève ainsi que des émeutes, durement réprimandées par les autorités.

Plonger dans cette atmosphère particulièrement bien mise en avant par l'auteur fut passionnante. Je me suis également beaucoup intéressée à Sam Wyndham, héros torturé possédant de nombreuses facettes, à la merci de démons et d'injonctions contradictoires, à la profondeur d'écriture admirable. Abir Mukherjee bénéficie en effet d'un talent certain pour l'élaboration de ses personnages, chacun des protagonistes du roman ayant une densité très appréciable.
Roman profondément documenté et documentaire, Avec la permission de Gandhi fut une lecture captivante me donnant envie de découvrir plus d'aventures du capitaine Wyndham.


Avec la permission de Gandhi | Abir Mukherjee | Traduit par Fanchita Gonzalez Batlle | Gallimard / Folio policier