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from Depuis les Gorces

« Je crois qu'on n'a rien à se reprocher, on a fait ce qu'il fallait. » « Je suis un homme féministe. » « J'ai agi par sororité. »

« Je crois qu'on n'a rien à se reprocher »

Je fais partie d'un groupe qui a géré un incident de violences verbales il y a quelques temps maintenant. Après la séquence, un homme m'a dit : « Je crois qu'on n'a rien à se reprocher, on a fait ce qu'il fallait faire », sous-entendant qu'on avait très bien réagi.

Je ne suis pas convaincue qu'on ait très bien réagi, mais je ne suis pas non plus convaincue de l'opposé.

Après avoir raccroché de notre conversation, j'ai réalisé ce qui m'avait gênée. Ce n'est pas à nous de décider de si on a bien réagi ou pas. On peut à la rigueur juger de si on a suivi les procédures ou pas. Et dans notre cas, il n'y avait pas de procédures.

En fait, il n'y a que les victimes qui peuvent réellement juger de si on a été un·e bon·nne allié·e, de si on a été à la hauteur. Et la seule manière de le savoir c'est de leur demander, et on ne l'a pas fait. Donc on ne sait pas si on a fait ce qu'il fallait. On a fait ce qu'on pensait qu'il fallait faire, petite nuance.

« Je suis un homme féministe »

Je parle souvent de féminisme, alors j'ai souvent entendu des hommes me déclarer qu'ils étaient féministes. De vrais alliés pour la cause. Au moment où j'écris ce billet de blog, je repense à trois d'entre eux :

  • L'un m'explique qu'il a connu les vraies années du féminismes (les années 70-80) et que le féminisme est une valeur très importante pour lui. Pourtant, il monopolise la parole lors de nos échanges et passe beaucoup de temps à m'expliquer des choses que je sais déjà, voir que je lui ai dites.
  • Le second m'explique que le vrai problème des femmes ce n'est pas l'écriture inclusive, mais le fait qu'elle ne soit pas aussi bien payées que les hommes à travail égal. Je lui réponds que le vrai problème des femmes c'est quand ce sont les hommes qui décident pour elles de ce que sont leurs vrais problèmes.
  • Un troisième m'explique qu'il apprend et qu'il n'y connait pas grand chose en féminisme comparativement à d'autres hommes du groupe qui connaissent des mots compliqués comme l'intersectionnalité. Pourtant, c'est l'homme qui a le moins de comportements virilistes de notre groupe. Vu de ma fenêtre, c'est le plus féministe.

Pour moi les deux premiers ne sont pas des masculinistes toxiques. Mais les deux ne sont pas franchement des féministes engagés. Ils auraient beaucoup à apprendre et à déconstruire pour être de bons alliés. Ils gagneraient à écouter pour de vrai les femmes qui les entourent sur ce qu'ils peuvent faire pour elles comme le fait le troisième larron de mon histoire.

Une bonne alliée des copines ?

En écrivant ce billet, je repense à deux évènements où je pouvais être la bonne alliée.

Quand j'ai merdé et qu'une copine m'a dit que j'avais agit par sororité

Récemment j'ai merdé. Une femme m'a confié un incident qu'il lui est arrivé, je l'ai écouté, je l'ai crue, et je l'ai soutenue.

Le lendemain j'ai eu l'impression qu'il était important que j'en parle à une amie qui s'entend bien avec les personnes impliquées, car elles ne se rendent pas compte de l'impact de certains de leurs comportements. J'avais l'impression qu'on pouvait améliorer les choses.

Quelques heures plus tard, j'ai réalisé que j'avais surement merdé : je n'avais pas demandé si je pouvais ou devais en parler. J'ai recontacté la personne qui s'était confiée, et effectivement, elle ne souhaitais pas que j'en parle. J'ai alors exprimé mes remords à ma copine, et je lui ai dit que je m'en voulais. Elle m'a répondu que j'avais agit en pensant bien faire, par sororité, donc je ne devais pas m'en vouloir.

Et là, le mot sororité a sonné très faux pour moi quand elle l'a dit.

Ce n'était pas de la sororité même si quelque part je voulais aider des femmes. C'était plutôt une forme de paternalisme : Je me suis autorisée à penser à la place de la personne ce qui serait bien. La seule personne qui aurait pu me dire que c'était de la sororité, c'est la personne concernée, et j'ai bien l'impression qu'elle ne l'a pas vécu comme ça.

Quand j'ai bien réagi

Il y a quelques temps, un Jean-Michel Boomer a été pénible avec une copine. Rien de très grave, mais un petit mansplaining comme il sait bien faire. J'en ai parlé avec la copine et je lui ai demandé si elle voulait que je lui réponde en privé. J'avais le statut dans ce groupe pour le faire, elle m'a dit que oui, ça l'arrangeait si je lui écrivais. J'ai donc écrit à Jean-Michel Boomer un message mesuré car ce n'était pas moi la victime, donc c'était plus facile que pour ma copine. Et j'ai ensuite montré le message à ma copine.

Quelques semaines plus tard, elle m'a dit qu'elle l'avait vraiment vécu cet évènement comme un moment de sororité. Moi j'avais vraiment l'impression de pas avoir fait grand chose. Ça m'a fait vraiment plaisir d'avoir été sur le coup une bonne alliée.

Poser la question

Ces trois petits incidents m'ont fait réaliser deux choses :

  1. Ce n'est pas aux alliés de décider qu'ils sont de bons alliés. Ce n'est pas aux hommes de se déclarer féministes : c'est aux femmes autour d'eux qu'il faut le demander.
  2. On devient un·e bon allié·e en demandant leur avis aux victimes d'oppression

Pour être une bonne alliée, je ne dois pas penser à la place des autres. Je dois leur demander :

  • Comment iels ont perçu mon action ?
  • Qu'est-ce que je peux faire pour les aider ?

J'espère qu'avoir écrit ce post va m'aider à moins merder dans le futur.

#Féminisme #Paternalisme #Sororité

 
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from FAUT L'FER

08/05/2025

Atelier 01 mars 2025

Les luminaires s'exposeront bientôt en boutique. Pour cette occasion, un logo spécifique à été créé et sera décliné sur différents supports.

Plus d'info à ce sujet tout bientôt.

Visitez la page du blog consacrée aux luminaires pour en savoir plus sur notre démarche créative.

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Billet précédant

#luminaires #Blog

 
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from Ma vie sans lui

La valise

Hier, j'ai fini par retirer les portraits de mon amoureux qui étaient dans des cadres à droite à gauche dans mon appartement. Notamment la grande photo de lui qui trônait sur ma table de nuit. Cela faisait un petit moment que je pensais le faire mais j'ai enfin passé le cap de l'action. Je les ai dépoussiérées, caressées, puis j'ai expliqué à mon amoureux – qui me regardait, droit, fier et avec un soupçon de rire au fond des yeux – que je faisais pas cela pour me débarrasser de lui, ni parce que j'avais envie ou besoin de l'oublier mais juste qu'actuellement, le voir tous les matins, tous les soirs, partout, cela ne m'aidait plus à avancer. Cela a été le cas au tout début, quand j'ai fait imprimer ces photos mais c'est terminé. A vrai dire, le voir tous les soirs en me couchant me déchire le cœur...

Alors j'ai rangé toutes ses photos dans la petite valise de souvenirs de lui, avec celle de sa maman (celle qui ne le quittait jamais, elle était au sommet de la Dune du Pyla, 2 jours avant l'AVC qui l'a laissée lourdement handicapée et dont mon amoureux ne s'est jamais vraiment remis non plus). J'en ai profité pour ressortir de la valise le calendrier 2024, celui que je ne n'étais pas parvenue à jeter. Ses illustrations – encadrées – feront sûrement de très chouettes décos dans ma nouvelle maison.

Photo en noir et blanc montrant une valise vintage, ouverte sur un lit. Dedans un spray, des documents noirs sur lesquels on voit une carte postale avec un homme qui écrit. Dans le couvercle, des poches dont dépasse une photo et une autre carte postale, à message.

J'ai aussi fait un peu de ménage par le vide dans ses journaux, ceux qui avaient échappé au premier tri. Ce faisant, j'ai retrouvé un carnet de notes préparatoires à ses émissions de radio. Revoir son écriture, relire ses mots m'a bouleversée. Je sais ce que moi, j'ai perdu (un amour extraordinaire, un homme merveilleux) mais soudain m'est apparu le fait que le monde entier a aussi perdu quelqu'un, un passionné de blues, un être hors du commun qui aimait partager, rire, blaguer, discuter, vivre. C'est absolument déchirant de penser à ça.

Un mot me pèse particulièrement, ces jours-ci, c'est le mot “seule”. “Oui, j'achète seule cette maison”, “Oui, je vis seule”, “Oui, je suis seule à assumer les charges du foyer”, “Non, je n'ai pas besoin de tout, cela fera trop pour moi toute seule”.

Je suis seule, je me sens seule, même bien entourée, par ma famille, par mes collègues, mes ami•e•s, ma petite communauté en ligne. Il y a des tas de moments où je n'y pense pas mais surtout des tas d'autres où cette solitude me fait comme un grand trou dans le ventre.

Mais, à bien y réfléchir, je ne sais pas encore si c'est la solitude en tant que telle qui me pèse ou si c'est l'absence de lui qui est toujours insupportable...

 
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from Un Spicilège

L'anomalie du train 006

Quand j'ai envie ou besoin de me réjouir de ma lecture, je me tourne vers Vis Comica, un excellent site traitant de littérature humoristique tenu par Francis Mizio. Je n'ai jamais été déçue par ses recommandations et c'est là que j'ai découvert L'anomalie du train 006, chaudement recommandé.

Cela faisait des années que je n'avais pas lu de pastiche. Avec ce livre, j'ai été gâtée : ce n'est pas un mais bien six auteurs auxquels s'attaque Pascal Fioretto. S'il est facile de penser à Hervé Le Tellier grâce au titre, il est moins évident, mais tout aussi désopilant de reconnaître Joël Dicker, Virginie Despentes, Emmanuel Carrère, Aurélie Valognes ou Sylvain Tesson.

C'est un véritable amusement de distinguer les tropes employés à outrance par tous nos auteurs (Hervé Le Tellier en tête, passablement étrillé, mais n'en gardant apparemment pas rancune puisqu'il signe la préface) et je salue par la même le formidable talent de Pascal Fioretto qui signe un texte pétri d'humour et de références tout en appuyant sur les facilités trop souvent empruntées par certains auteurs.

Les très grandes qualités de style de l'ouvrage nous permettent rapidement de pardonner ces petites taquineries et tout le monde ressort grandi de cette lecture extrêmement drôle.


L'anomalie du train 006 | Pascal Fioretto | Éditions Heriodos

 
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from Impulsion Végé

Faire un bon repas végétalien, ça ne paraît pas évident quand on n'a pas l'habitude et pourtant ça ne tient pas à grand chose : des légumes, des légumineuses, des féculents.

Assiette de légumes et tartinade

Dans cette assiette-ci, il y a donc : – des légumes : aubergine au four, poêlée de poireau et champignons, tomates séchées – des légumineuses : une tartinade de pois cassés – du pain

Rien de bien fou fou. En vrai j'avais une aubergine et un poireau qui faisaient la gueule, et de la tartinade au congélo. Et ça c'est la super astuce : la tartinade se congèle très bien !

Donc, pour deux assiettes comme cela :

Les légumes

Ingrédients : – 1 aubergine – 1 poireau – 4 champignons de paris – huile – moutarde – sel, poivre, épices au choix

Instructions : 1. Préchauffer le four à 180° 2. Couper l'aubergine en rondelles, badigeonner d'huile, assaisonner selon votre goût, mettre sur une plaque et au four pour 30 minutes 3. Pendant ce temps, couper le poireau en rondelles et les champignons en quatre, puis les faire revenir avec un peu d'huile 4. Lorsque la poêlée de poireau/champignons est cuite à votre goût, encore un peu croquant ou fondant au choix, ajouter un peu de moutarde.

La tartinade de pois cassé (Version très simple)

Ingrédients : – 200g pois cassés – huile d'olive – jus d'un citron – sel poivre, épices au choix

Instructions : 1. Faire cuire les pois cassés selon les instructions du paquet 2. Egoutter en gardant un peu d'eau de cuisson 3. Mixer en ajoutant de l'huile d'olive, du jus de citron, sel, poivre, épices. Rajouter de l'eau de cuisson si besoin.

#AssietteVégétalienne #TartinadeVégétalienne

 
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from Poltergeist

Me voici quasiment cloué au lit suite à une opération, c'est le moment de faire un peu le point sur mes dernières lectures frappantes, d'autant qu'en prévision de ce moment j'ai dépensé mes sous à tort et à travers libéralement dans les librairies pour alimenter le plaisir anticipé consistant à créer des piles de lectures au pied de mon lit et dans mes étagères.

Octavia Butler

La parabole du semeur : voilà enfin un récit post-apo qui tabasse.

Je l'avais commencé avec un enthousiasme modéré parce que ce genre de SF n'est pas trop ma tasse de thé, et aussi parce que le synopsis est drôlement proche de La route (Cormac McCarthy) qui m'était tombé des mains tellement c'est une bouse emmerdante et sans intérêt. Quelle maladie a touché la presse française à la sortie de ce pensum, je me le demande. Il faut aimer se flageller avec des orties pour apprécier. Donnez-moi par pitié cent mille Octavia et Ursula et rangez Cormac à la poubelle. D'ailleurs je suppute que le critique français masturbateur aime bien trouver de temps en temps une œuvre de genre cette fois c'est tombé sur “la science fiction” c'était l'occasion rhalala ça m'énerve. Et au fait, pas de science ici c'est une anticipation.

Un synopsis proche disais-je, celui de la fin du monde, amené de manière très intelligente sur le fond et formidable dans la forme car on lit un journal intime, écrit de manière tellement prenante et vivante qu'on s'y croit totalement. Chose amusante : l'histoire, écrite en 93, se déroule en 2025 et (presque) tout est tellement réaliste. En tout cas, la manière dont le monde s'effondre est très réaliste, à tel point que c'est une fictions les plus ancrées que j'aie lu sur ce thème. Je l'ai acheté dans un élan de littérature “sérieuse”, sans doute en même temps que des essais qui resteront inachevés sur une étagère -ça m'arrive régulièrement- cette fois-ci il arrivait tout de même auréolé de critiques (de critiques de gens qui savent ce qu'ils lisent, je précise) très positives, et c'est l'occasion de découvrir une autrice importante. Ça brasse large, j'ai eu un peu de mal à entrer dedans puis le déclic s'est fait et je l'ai lu d'une traite.


Ann Leckie

En parlant de science-fiction, de la vraie cette fois avec des vaisseaux spatiaux et tout, j'ai acheté un recueil de nouvelles d'Ann Leckie qui a obtenu de manière très très méritée le prix Hugo 2024 pour Les Chroniques du Radch, une des choses les plus follement innovantes que j'ai lu depuis des années, que je ne vais pas raconter , mais qui a un ton, un univers, des personnages extraordinairement singuliers et attachants. Il m'est resté longtemps en tête, et malgré sa sortie récente je l'ai lu plusieurs fois. Bref j'attends beaucoup de ce livre, sa tranche me regarde depuis l'étagère et je savoure le moment où je l'ouvrirai, même si les nouvelles sont moins ma tasse de thé que les romans.

Benjamin Labatut

À propos de tranche qui me regarde et réciproquement, j'ai prévu de lire Maniac après avoir dévoré d'un coup Lumières aveugles, un autre livre impossible à décrire ou résumer et tellement étrange, exotique et bizarre... Il a un côté collection d'anecdotes filées qui m'a fait un peu penser à ce que faisait Sebald avec l'histoire (la grande histoire, la sienne, celle de ses proches), mais lui s'intéresse à l'histoire des sciences : c'est intriguant puis intéressant puis perturbant à mesure qu'on se demande où est le vrai. Un livre très très fort.

Alexis Jenni

Également, j'ai lu la courte biographie de John Muir par Alexis Jenni, une très jolie découverte qui m'accompagnera longtemps je pense.

J'avoue je ne connaissais pas John Muir, sauf peut-être pour avoir croisé son nom parfois ? en tout cas je ne connaissais pas son histoire et elle est littéralement extraordinaire, y compris pour ses contemporains. Et puis elle se déroule encore cette époque bénie où les frontières entre sciences n'existaient pas comme aujourd'hui et où l'on pouvait devenir à la fois ingénieur, géologue, naturaliste et bien sûr homme de lettres. En plus à cette période charnière où la conquête est terminée mais pas la découverte et où se mettent en place les mécaniques de domination dont on voit aujourd'hui la continuation, les mêmes causes produisant les mêmes effets.

Mais surtout, quel aventurier incroyable, qui n'a eu de cesse de se déplacer à travers le monde pour en constater et relater les beautés et surtout les éprouver de manière physique et spirituelle. Bref une biographie classique mais qui va au cœur de l'individu John Muir, et écrite avec une grande tendresse.

Laurent Gaudé

Sinon en début d'année j'ai lu deux livres de Laurent Gaudé, d'abord La porte des Enfers, parce que j'avais conservé un bon souvenir du soleil des Scorta et que j'avais celui-ci dans ma bibliothèque depuis un moment. C'est très bien écrit, vraiment. C'est également sinistre au dernier degré : pas un rai de lumière dans ce cloaque. Alors certes l’œuvre traite de la mort et du deuil mais quand même.

En plus les aspects mythologiques sont bizarrement amenés, puis curieusement traités, c'est à la fois trop terre-à-terre et fantasmagorique. Et au final la description des enfers est d'une monotonie barbante. Bref, une lecture déprimante. La langue reste belle et heureusement c'est assez court.

Et comme la critique était positive, j'ai lu dans la foulée ou presque, Chien 51, un polar SF dystopique, toujours aussi bien écrit et sans fausse note, lui. Son univers est particulièrement consistant et réaliste, sa construction m'a beaucoup plu, les personnages sont attachants et le mystère reste entier jusqu'aux dernières pages.

Par contre c'est de nouveau sinistre et déprimant, rien ne vient égayer cette vision terrifiante de notre futur : je ne suis pas certain de continuer à lire Gaudé :)

Ted Conover

Une découverte incroyable, grâce à une émission de radio je crois (il a dû passer dans les midis de Culture), dont le pitch n'est pas forcément très attirant.

J'ai donc lu d'une traite Là où la terre ne vaut rien (plus précisément là ou l'hectare de terrain vaut 1000$) en gardant en tête les paysages somptueux du Colorado et ce qu'ils remontent de construction culturelle sur ces paysages “vides” qui n'attendent que des colons.

Le défilé de personnalités hors normes est incroyable, tout comme la pauvreté saisissante de ces laissés-pour-compte et ce qu'ils racontent de l'Amérique d'aujourd'hui.

Mathieu Auzanneau

Un auteur qui connaît bien son sujet car il dirige the Shift Project et a déjà écrit une somme sur le pétrole (Or noir, la grande histoire du pétrole, je sais que c'est une somme car je l'ai chez moi et il fait 10 cm d'épaisseur).
Ici nous sommes plutôt dans l'hyper-light : Pétrole, le déclin est proche se lit en une soirée. Une soirée agréable car c'est bien écrit et on y apprend beaucoup.

Le livre part d'une histoire proche : en 2000, le concept de pic pétrolier était dans l'air puis les américains ont “inventé” le gaz et le pétrole de schiste et magiquement la question des limites de ressources énergétiques a disparu du débat public. Le shift project a eu accès vers les années 2020 a des données très peu partagées, produites par un des principaux cabinets qui compilent de la donnée relative au stock (données généralement vendues à prix d'or aux acteurs du secteur). En faisant converger pas mal d'informations, il postule que le pic pétrolier a été atteint vers 2021 et que nous faisons désormais face à la fin du pétrole facile à une échéance connue et surtout, proche. Proche, c'est 2030, 2040, 2050 ? dans pas longtemps en tout cas, surtout à l'échelle de notre civilisation qui s'est construite sur une énergie surabondante depuis 200 ans.

Et c'est précisément cet aspect du livre qui m'a le plus fasciné : envisager l'histoire et la géopolitique sous le prisme de la disponibilité des ressources ce qui modifie pas mal d'idées préconçues : Pearl Harbour ? les japonais cherchaient à accéder aux ressources pétrolières du sud asiatique. Les allemands ont perdu la deuxième guerre ? c'était inévitable car ils n'avaient pas suffisamment d'énergie face au bloc de l'ouest. Et je ne parle même pas de la guerre en Irak. Je cite de mémoire “ces guerres ont eu lieu en période de surabondance, que seront-elles lorsque les ressources seront en train de se tarir ?

Une partie du livre expose les contraintes physiques liées à l'exploitation des ressources fossiles et explique pourquoi les chiffres généralement agités par les industriels ou les politiciens ne sont pas fiables.

Et il rappelle utilement ce qu'on croit savoir par ailleurs : notre civilisation et notre mode de vie reposent sur le pétrole. Pas de pétrole ? pas de médicament, pas de production agricole sans paysan, pas de biens de consommation courante, pas de transferts sur le globe. Et d'un point de vue géopolitique, pas de domination américaine.

Et puis bien sûr il appuie là où ça fait mal : la fin du pétrole ne signifiera pas la fin de l'extractivisme ou la baisse d'émissions de GES. Le fait que personne ne s'y prépare rend inéluctables des chocs monstrueux à venir.

Bref un livre salutaire avec un côté curieusement enthousiasmant, façon puzzle : une esquisse de la fin d'un monde. Dommage que ce soit la réalité et qu'on soit en plein dedans.

L'atelier paysan

Ce livre est presque déjà un classique en tant que critique du techno-solutionnisme. Moi, qui pensait connaître le sujet, ai beaucoup appris en le lisant, notamment sur l'histoire de la mécanisation.

En décortiquant les rouages de la grosse machinerie agricole, la démonstration est faite de nouveau, que les paysans sont avec les consommateurs les premières victimes d'un système industriel qui a des racines historiques profondes et répond à une idéologie délétère.

Je l'ai lu dans la foulée de celui sur le pétrole, ça va bien ensemble.

Larry McMurtry

Restons en Amérique avec Lonesome Dove, un chef-d’œuvre à bien des niveaux.

Il nous fait suivre un groupe de Texas Ranger, plus particulièrement d'eux d'entre eux ainsi que plusieurs personnages annexes dans les années 1840 à la frontière des États-Unis et du Mexique qui n'a pas encore sa forme actuelle et ressemble plutôt à un gigantesque no man's land où les colons risquent leur vie et où les Indiens tentent encore de vivre la leur.

Je n'avais encore jamais lu d'histoire aussi documentée se déroulant à cette époque, je trouve que le roman éclaire beaucoup la mentalité des pionniers qui explique tellement de choses sur la vie publique américaine. Il montre aussi la construction mouvementée de l'unité territoriale américaine, qu'on connaît mal en France il faut bien dire.

Les personnages sont tous étrangement attachants, j'écris étrangement car plusieurs d'entre eux sont complètement barrés. Ils sont aussi très ambivalents et ont parfois du mal à justifier leurs propres actes ce qui nous les rapproche. Les dialogues sont savoureux et souvent drôles. L'auteur suit les personnages un à un et nous fait ainsi brièvement mais aussi très rapidement comprendre le point de vue des personnages, pas en tant qu'archétype (indien/ranger par exemple) mais en tant qu'individu.

Et les personnages de femmes, ha ! sont incroyables surtout dans le deuxième volet. Bref un must-read.

DOA

J'avais acheté Rétiaires il y a plusieurs mois puis je l''ai laissé sciemment prendre la poussière sur une étagère parce que j'attendais le moment propice à sa lecture pour deux raisons ; d'abord, ce n'était pas rien de se plonger dans Citoyens clandestins puis dans Pukhtu alors j'attendais d'être psychologiquement un peu disponible pour l'entamer.

Qu'on se rassure le livre est beaucoup moins foisonnant et complexe que Pukhtu, je le qualifierais de polar “classique” bien enlevé avec des personnages ambigus comme on aime (surtout du côté des flics, les voyous sont plus attendus), un intrigue assez straight mais qui utilise un peu trop de retours en arrière à mon goût.

Je l'ai lu d'une traite ça reste un bon polar bien documenté et qui donne une vraie impression d'être embarqué en quelques mots dans les organisations de chaque côté, mais il est trop classique dans sa construction par rapport à ce que je connaissais déjà de l'oeuvre de DOA alors j'ai été un poil déçu.

#lectures

 
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from Impulsion Végé

Ma recette de cake végétalien salé, je l'ai trouvé ici : Cake salé sans oeufs (vegan)

C'est ma recette de base que j'utilise dès que je veux faire un cake salé.

Sauf que vendredi, les placards étaient vides, le frigo était vide et ... les estomacs aussi. Je n'avais plus de lait végétal, mais il me restait un demi bocal de sauce tomate. Alors je me suis dit que ça irait très bien pour remplacer le lait végétal dans un cake. Et j'avais raison, ça fonctionne très bien !

Cake à la tomate

Donc, ma recette :

Moule : 1 moule à cake de 28 cm de long

Ingrédients : – 200g de farine T45 – 4g de bicarbonate – 1cc de sel – 60g d'huile neutre – 200g de sauce tomate cuisinée (sauce pour les pâtes) – 50g d'eau (optionnel : selon la texture) – 1cs de vinaigre de cidre

Instructions : 1. Préchauffer le four à 200°C 2. Mettre tous les ingrédients secs dans un grand bol. 3. Ajouter au fur et à mesure les ingrédients liquides tout en mélangeant. 4. Verser la préparation dans le moule à cake préalablement recouvert de papier cuisson ou huilé 5. Mettre au four pour 35 minutes.

#CakeVegetalien

 
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from Blog d'une enfant de ce siècle

ATTACHEMENT

◦ “Par amour”?

On peut faire dire ce qu'on veut à l'amour. On peut tout justifier en son nom.

◦ Yuna Tourmen en témoigne dans son spectacle sur l'inceste, “C'est ça le vrai Bonheur”. L'association L'ange bleu a inspiré cette écriture. Cette dernière faisait se rencontrer les agresseurs et les anciennes victimes de pédophilie, de manière cadrée, si elles le souhaitaient. Au fil des témoignages, les bonnes intentions des agresseurs se sont avérées glaçantes.

◦ Julian Smith, de son côté, formule l'argument en pleine scène de chantage affectif, avec un humour noir qui lui est propre dans sa vidéo “JULIAN SMITH : Hot Kool Aid” : “I made this for you! I did, because I love you!”

On met fin à sa vie par amour, on sacrifie sa dignité ou sa liberté par amour, on se met en colère sans explication par amour, on soupçonne, on bat et on tue par amour? Ou bien par désespoir?

On peut faire dire ce qu'on veut à l'amour. Le sens même du mot pose problème. Mais ce qui nous lie à nos proches, selon la théorie du même nom, c'est l'attachement, dont la théorie est amenée par John Bowlby. Laissons l'amour aux formes poétiques, s'il s'agit de rationnaliser.

◦ Les troubles de l'attachement

Le Raga, selon wikiland, prends les sens de : « l'avidité, la sensualité, le désir » ou « l'attachement à un objet sensoriel ». C'est un des trois poison engendré par l'ignorance.

L'attachement est nécessaire à notre survie tout le long de notre enfance. Pourtant, par attachement pour quelqu'un, par envie de le voir heureux, épanoui, en sécurité ou proche de nous, nous pouvons poser des actes qui ne sont pas toujours compris. Ces actes peuvent être d'autant plus complexes à comprendre, si notre attachement est teinté de blessures psychologiques subies dans l'enfance.

Le Youtubeur Psychocouac en parle de manière très pédagogue dans sa série de vidéos sur l'attachement :

Première vidéo de PsykoCouac sur l'attachement

Ces blessures, qu'elles soient, d'abandon, de rejet, d'humiliation, etc, transforment notre attachement. Enfant, nous avons besoin d'un “caregiver”, d'un adulte de référence qui soigne nos besoins et nous aide à nous émanciper. Mais quand ce modèle est disfonctionnel, l'attachement de l'enfant peut devenir insécure. Si c'est le cas, cette insécurité aura un impact sur ses relations et sa manière de se sentir en société.

Ernesto

◦ Ressources

Bien sur ce n'est pas irréversible, ce n'est même pas catégorique. Notre type d'attachement a plusieurs aspects, il peut engendrer des comportements sécures, évitants ou ambivalents, selon la situation et l'histoire de chacun. On peut avoir un attachement sécure avec certaines personnes, et insécure pour d'autres. Il arrive même qu'au début d'une relation l'attachement de chacun soit sécure, mais qu'il devienne insécure au fil du temps et des épreuves.

“Dis-moi qui tu aimes, et je te dirai qui tu es” de Marc Pistorio EAN : 9782924402573

“Liens d'attachement, 100% illustré” Editions Eyrolles, EAN13 9782416013669 ISBN13 978-2-416-01366-9

◦ Aides

Il est possible de sécuriser son attachement par le biais d'un accompagnement thérapeutique. Il s'agit là d'identifier et canaliser ses émotions, travailler sur ses croyances limitantes, améliorer la clarté dans sa communication, et tisser des liens sécurisants.

Les styles de thérapies diffèrent selon les profils et les besoins de chacun. Les psychologues remboursés pas la sécurité sociale, on peut globalement les trouver sur Doctolib, ou par le biais d'associations, ou de Citad'elles, qui propose des accompagnements psychologiques à celles qui n'en ont pas.

Mais si on veut explorer des méthodes spécifiques, les séances ne sont globalement pas remboursables, et varient entre 50 et 70 euros la séance d'une heure.

Voici quelques exemple de thérapies spécifiques en lesquelles j'ai foi :

Méthode Filliozat Livre “L'intelligence du coeur” d'Isabelle Filliozat EAN 9782501139496 Ce livre permet permet d'approcher le concept d'intelligence émotionnelle.

Thérapeutes formés à la methode Filliozat

Internal Family System : Dans cette vidéo, Richard Schwartz (une référence en matière de CNV) explique le principe de sa méthode de l'IFS.

Thérapeutes formés à la méthode IFS

Un accompagnement ou une formation à la CNV peut aussi être une aide. Mais dans tout les cas, il s'agit de commencer à identifier son ou ses type(s) d'attachement afin de connaître au mieux ses limites. Il est possible de le déterminer à travers Ce test sur internet, mais un résultat fiable s'appuie surtout sur l'aide d'un thérapeute formé pour ça.

“Love doesn't exist. (...) Love has to be reinvented” Rimbaud Verlaine (Total Eclypse), film, 1995

 
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from Un Spicilège

Les morts ont la parole

J’ai découvert le Docteur Boxho (comme beaucoup, je crois) à travers ses interviews dans un podcast aussi célèbre que décrié. J'avais vite décroché, cependant, car l'interview m’agaçait un peu. Trop sensationnaliste, trop superficiel, il m'était difficile d’accrocher au personnage à travers l'angle choisi.

Cependant, j’ai un très vif intérêt pour la médecine légale et quand il s’est agit de choisir un nouveau livre audio pour m’accompagner dans mes footings, je me suis laissée tenter par son tout premier ouvrage, me disant qu’il serait à minima suffisamment distrayant pour détourner mon attention de mes efforts.

J’ai été assez surprise de découvrir que dans son livre, le Docteur Boxho est tout ce qu’il n’est pas dans les interviews dont je parlais au-dessus : humble, pédagogue, respectueux et ayant avant tout à cœur de partager des connaissances autour de cette profession fascinante qui, sans nul doute, est devenue une passion. (Petite parenthèse pour me dire que finalement, mon aversion venait sans doute plus de mes intérêts complètement divergents avec l'interviewer que de l'interviewé).

Les morts ont la parole permet en effet d'en découvrir beaucoup plus sur le métier de médecin légiste et sur le système judiciaire belge, puisque c'est le pays dans lequel exerce le Docteur Boxho. Outre de nombreux rappels historiques, il se sert de certains cas qu'il a eu à traiter au cours de sa carrière pour détailler les techniques employées, leur évolution, leurs intérêts et leurs limites. C'est une véritable mine d'or pour qui s'intéresse à la discipline. Les cas en question, s'ils sont souvent insolites, présentent avant tout ce qui fait l'essentiel du quotidien d'un médecin légiste : beaucoup de suicides et quelques morts suspectes.

Au-delà de l'aspect scientifique, je n'ai pu m'empêcher de ressentir une sorte d'hommage dans la volonté du docteur Boxho de faire toute la lumière sur la manière dont ces personnes ont disparu. Il transparaît, à la lecture, qu'il a à cœur de traiter les défunts avec égards. Le tout avec une pointe d'humour belge (un des meilleurs du monde) qualité supplémentaire à ajouter à un ouvrage qui n'en manque déjà pas.

Je ne regrette donc pas mon choix, ayant passé un excellent moment (les douleurs dans les jambes en moins) à la découverte de cette discipline captivante.


Les morts ont la parole | Docteur Philippe Boxho | Kennes Éditions/Audiolib

 
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from Ma vie sans lui

Mourir ? Hors de question !

La semaine dernière, le lendemain de mon anniversaire, je me suis réveillée avec une douleur sourde dans la poitrine. C'était comme si quelqu'un s'était assis dessus et m'empêchait de respirer profondément. Et d'ailleurs, ça faisait mal, d'inspirer. J'ai pris conscience de cette douleur au petit-déjeuner, après une nuit vraiment merdique où je n'avais trouvé aucune position agréable dans laquelle dormir et je me suis donc posée la question : qu'est-ce qu'il m'arrive ?

Un petit tour vite fait sur un moteur de recherche m'a alertée. Douleur thoracique = consulter et vite. Même si ce n'est pas toujours pour une raison grave ou vitale, il faut éliminer ces dernières avant de procrastiner. J'ai donc appelé le 15 et de fil en aiguille, j'ai fini par passer la journée aux urgences de l'hôpital le plus proche pour des examens qui ont révélé une infection du péricarde. Le soir, j'étais rentrée et depuis, je me soigne à grands coups d'anti-inflammatoires.

Ce matin-là, une pensée a traversé mon esprit. Non, plein de pensées, en vrai, mais une tenace : il est hors de question qu'une deuxième personne meure dans cette cuisine. Il est hors de question de mourir pour moi, quels que soient les moments compliqués par lesquels je passe, quelle que soit la tristesse qui est parfois la mienne, quel que soit le manque d'intérêt que j'éprouve pour la vie, il est hors de question que je meure. Je veux vivre.

Et c'est sans doute stupide mais le formuler à voix haute comme je l'ai fait en attendant les ambulanciers, ça m'a aidé à franchir un nouveau cap. J'ai dit à mon amoureux qu'il n'était pas l'heure pour moi de le rejoindre et que cette fois, j'allais m'écouter, écouter ce que mon corps avait à me dire avant qu'il ne soit trop tard. Je lui ai dit que je l'aimais mais qu'il me restait encore des choses à vivre et que je ne lâcherais pas l'affaire.

J'ai beaucoup pleuré dans l'ambulance qui m'emmenait vers la ville voisine. Stress, chagrin, soulagement ? J'ai gentiment craqué, avec la bénédiction de l'ambulancière qui avait l'âge de mon fils cadet. Je me disais que mon cœur avait fini par se briser pour de vrai en mille morceaux sous le chagrin, que la mort de mon amoureux avait fini par me rattraper, moi qui avais l'impression de plutôt bien m'en tirer jusque là. Elle m'a doucement rappelée à la réalité : le chagrin ne part jamais vraiment, on ne se remet jamais vraiment d'un deuil, il ne fait que s'estomper, passer au second plan...

Mon cœur n'est pas cassé. Je ne suis pas cassée. Je suis vivante et je ne veux pas que cela change, mon corps est vivant, il bouge, il vibre, il s'enflamme, il a mal. J'ai signé tout à l'heure le compromis de vente pour la maison que je convoitais. Tout le monde m'a dit “Vous avez eu un “coup de cœur” pour cette maison” et c'est vrai. Mon cœur n'est donc pas cassé, il bat encore et je construis, je fais des projets, je me projette vers l'avenir, j'essaie, en tout cas.

Mon amoureux me manque à en crever, d'accord mais mourir, c'est hors de question !

 
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from Depuis les Gorces

Je me rappelle très bien quand je vivais encore à Lyon, quand j'étais encore étudiante, et que j'étais persuadée d'être une erreur de casting. L'école que j'avais intégrée recrutait des personnes très intelligentes, et j'étais convaincue que ça n'était pas mon cas.

Arrivée à l'ENS par erreur

Après les classes prépa, j'ai intégré l'ENS de Lyon : une école qui avait la réputation de réunir des gens très intelligents. Je suis rentrée très bien classée au concours. Mais très vite, je me suis rendue compte qu'il y avait eu erreur.

Je n'étais pas du tout aussi brillante que certains de mes camarades. J'avais juste beaucoup travaillé et j'avais eu de la chance, mais je n'étais pas particulièrement intelligente. Je le savais déjà car en prépa j'avais réussi mais en travaillant régulièrement. L'ENS me l'a rapidement confirmé : j'avais passé 5 ou 6 heures à essayer de faire le premier de TD de physique statistique, et je n'avais rien compris. Je trainais avec quelques garçons qui n'avaient rien préparé, ou bien juste un peu, et qui avaient l'air de maîtriser.

Pendant ces années dorées (payée nourrie logée pour apprendre), j'ai eu un énorme sentiment de ne jamais être à ma place. Je me sentais nulle, j'avais un bon gros syndrome de l'impostrice.

L'échelle de l'intelligence

J'avais l'impression de partager avec mes camarades une sorte d'échelle d'intelligence sur laquelle on plaçait les gens. On en parlait pas vraiment explicitement, sauf pour mettre en avant une personne vraiment très forte, et systématiquement, c'était un garçon.

Des preuves d'intelligence

Il y avait plein de signes qui montraient qu'on était, ou pas, très intelligent.

Je me rappelle de ce gars qui ramenait le Cohen-Tanoudji (gros bouquin de mécanique quantique avec plein de maths) au foyer, l'endroit où on venait normalement boire des coups et déconner. Si ça se trouve, il aimait lire des trucs compliqués avec un verre de bière et du bruit autour. Mais peut-être qu'il faisait comme ceux qui mettent des gros livres bien en évidence derrière eux quand ils font des visios. En tous cas, moi ça me renvoyait que je n'étais clairement pas passionnée au point d'amener des livres de sciences au bar, et qu'il me fallait un environnement hyper calme, et tous mes neurones, pour ouvrir ce genre de livre, pas comme lui. J'étais donc moins intelligente.

L'autre preuve d'intelligence, c'était de ne pas travailler, et de réussir les examens quand même. Pas de bol pour moi, c'était réellement ce qui arrivait à mon copain. Il venait en cours où il prenait des notes et posait quelques questions, et puis il ne rouvrait jamais aucun cours. Moi j'étais une laborieuse, j'avais besoin de travailler pour réussir.

J'ai compris plus tard que ce n'est pas pareil de grandir avec un père chercheur ou avec une mère psy, d'avoir fait 3 années de prépa ou seulement deux. Et que si j'étais moins forte en maths, c'était parce que c'était une compétence que j'avais quand même moins travaillé. Il m'a fallu des années pour déconstruire le mythe qui dit que l'intelligence qui fait qu'on réussit en maths est un don.

Sexisme intégré

Je me rappelle des discussions pour savoir qui était le génie, la personne ultra brillante, qui aurait dû intégrer Ulm (l'école encore plus prestigieuse), mais qui avait terminé avec nous, et qui serait le Cédric Villani de notre promotion. Les noms qui circulaient parmi nous n'étaient évidemment que des noms de garçons. Je n'ai jamais pensé pendant ces années que ça aurait pu être l'une d'entre nous, l'une des filles.

Pourtant, on avait une femme enseignante qui était vraiment brillante d'après les autres enseignant·es. Mais elle n'était pas une très bonne enseignant·e, et son mari avait l'air encore plus brillant. Il y avait beaucoup plus de légendes sur l'intelligence de son mari, qui faisait de la physique statistique et qui était méprisant, que sur elle qui faisait de la mécanique des fluides et qui était gentille.

20 ans plus tard, la personne qui me semble avoir eu la carrière scientifique la plus brillante du point de vue de la puissance de l'intelligence scientifique de ma promo, c'est une fille que je ne connaissais pas très bien. Elle était discrète, elle était l'une des rares filles à être allée en M2 recherche, et elle est aujourd'hui médaille de bronze du CNRS.

Et aujourd'hui je suis intiment convaincue que les femmes sont aussi intelligentes que les hommes et qu'il y a des tas de chercheuses brillantissimes. Juste, que le monde de la recherche, et le monde de la communication autour de la recherche, sont des mondes extrêmement sexistes. Les femmes galèrent plus pour réussir, et leurs résultats sont moins valorisés que ceux des hommes.

  • Pour aller plus loin sur ce qu'on peut faire pour lutter contre le sexisme dans les études de sciences, j'ai adoré l'écoute de l'épisode du podcast « Les couilles sur la table » avec Isabelle Collet : Des ordis, des souris et des hommes.

Le culte de l'excellence

Sans le vouloir, l'institution nourrit cette culture toxique.

Classer les élèves

Je pense que les enseignant·es nourrissent cette culture toxique lorsqu'iels pensent qu'il y a réellement un sens à classer les étudiant·es (et non leurs résultats).

Je me rappelle une copine qui est partie faire un semestre à l'étranger. Elle y a eu des meilleures notes qu'à l'ENS. À son retour les enseignant·es de l'ENS ont décidé de lui baisser sa moyenne de quelques points car elle ne valait pas autant. Il était inconcevable qu'elle aurait pu mieux réussir là-bas car elle avait choisi des matières qui lui convenaient mieux, ou parce que les enseignant·es y étaient meilleurs.

Une seule compétence valorisée

J'ai eu l'impression qu'il y avait une seule compétence vraiment valorisée : la capacité à mener des raisonnements calculatoires. Cela renforce l'idée qu'il existe une seule compétence qui vaille, et que c'est l'intelligence qui caractérise la valeur d'un·e élève. Je me rappelle aussi mon directeur de thèse dépité que je n'arrive pas à mener un gros calcul et me dire : « Mais tu n'as pas eu le concours toi ?? ». « Bah si, mais pas grâce aux épreuves écrites 🫣 »...

À l'inverse, je dois reconnaître qu'il y a eu quelques initiatives chouettes pour valoriser d'autres compétences. Je me rappelle ce prof qui nous a dit que l'examen porterait sur notre capacité à comprendre la physique et pas à faire des maths : j'étais super excitée ! Ou ces enseignant·es de M2 qui nous ont interrogé sur un article de recherche et pas sur notre capacité à faire des calculs de bourrin en temps limité. Merci à eux.

La mécanique du jugement

Juger celleux qui sont en dessous

À la différence des maths, quand on dit que Bob est plus intelligent qu'Alice, en général, ce n'est pas neutre. Implicitement, on dit que Bob a plus de valeur qu'Alice. Et puis on va se rattraper en disant que Alice a d'autres qualités hein, elle est très gentille par exemple. (Je hurle intérieurement en écrivant ce paragraphe puant de sexisme).

Or donc, j'ai l'impression que quand on croit que cette échelle existe, et qu'elle compte pour nous définir, on ne veut pas être trop en bas de l'échelle. Du coup, c'est rassurant de juger que certaines personnes sont moins intelligentes que moi. Ça veut dire que je suis plus haut sur l'échelle avec les gens intelligents, non ?

Un mécanisme pervers

Mais ces échelles sont perverses. On n'est jamais tout en haut de l'échelle, on est toujours la nulle de quelqu'un d'autre.

Je pense qu'à cette époque je méprisais celleux que je pensais en dessous, et j'enviais ceux qui étaient au dessus Et je me sentais nulle quand je les regardais. C'était une mécanique vraiment nulle dont je ne suis pas du tout fière.

Je vois encore plusieurs copines qui méprisent vraiment fort les personnes qu'elles considèrent comme moins intelligentes qu'elles. Je suis souvent du côté des personnes qu'elles classent comme “ plus intelligentes”. D'un côté c'est flatteur, mais en vrai, c'est merdique.

  • Ces copines sont souvent condescendantes et parfois maltraitantes avec des personnes qu'elles ne jugent pas assez intelligentes. Et ça me fait mal de voir ça.
  • Et surtout, plus égoïstement, elles sont souvent pénibles avec moi. J'ai l'impression qu'elles cherchent à me montrer mes erreurs, ce que je ne sais pas ou que je n'ai pas compris pour pouvoir m'appuyer un peu sur la tête et monter elles un peu plus haut sur l'échelle.

J'ai réalisé assez récemment que j'appréciais ces copines qui souvent me renvoient une image flatteuse, mais que je suis toujours sur le qui-vive de la remarque passive-agressive bien désagréable. Est-ce qu'on peut avoir une amitié entre deux personnes qui se voient à des places différentes sur une échelle de valeur ? Je n'en sais rien...

Conclusion

Je me suis fait du mal, et j'en ai fait à d'autres en renforçant cette culture toxique de l'intelligence logico-mathématiques. En fait, je suis convaincue que d'en parler et d'expliquer comment cette mécanique du jugement fonctionne aide à s'en défaire.

J'ai vraiment pris conscience en thèse que je jugeais sur l'intelligence, quand j'étais dans un environnement moins toxique, et que j'ai pu constater la diversité des personnes qui faisaient de la recherche autour de moi. Mon parcours en sciences de l'éducation m'a ensuite convaincue que la performance est le fruit d'autre chose qu'une intelligence qui serait innée. Cet article me permet de rajouter une petite pierre pour :

  1. Déconstruire le mythe de l'intelligence scientifique innée. Il n'y a pas de don qui fait qu'une personne devient Einstein. Il y a certes une petite prédisposition, mais c'est surtout : un environnement qui permet de cultiver la compétence parce qu'on a les bons guides, les bonnes lectures, du temps à y consacrer, une bonne santé physique et mentale, etc.
  2. Déconstruire l'échelle de valeur associée à cette intelligence scientifique. Ma thèse m'a appris que la recherche était une aventure collective et qu'il y avait besoin de compétences diverses. Mon directeur de thèse est brillant, mais il n'aurait jamais eu cette carrière s'il n'avait pas été entouré de gens moins créatifs/brillants mathématiquement, mais très rigoureux et très patients. Il y a vraiment besoin de tout un tas de qualités et de compétences très différentes en recherche, et c'est encore plus vrai aujourd'hui.
  3. Nourrir une réflexion plus large sur le poids des jugements de valeur dans nos relations amicales et familiales. Je viens d'une famille grossophobe, classiste, élitiste, sexiste, qui croit en la valeur travail... J'ai mis du temps à voir que j'étais jugeante, à voir que je ne supportais pas être jugée, à comprendre à quel point j'étais construite sur ces jugements. Et à commencer à les déconstruire...

Work In Progress...

 
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from Blog d'une enfant de ce siècle

CELIBATTANT.E

Définition

“Célibataire, déterminé.e et indépendant.e, œuvrant activement à atteindre ses objectifs personnels et professionnels.” Emergeance du terme dans les années 80. Soucre: Lalanguefrançaise.com

Etre célibattant.e à mon sens, est un engagement. Pas celui de finir sa vie seul.e quoiqu’il arrive, ou de se résoudre à vivre seul.e comme une fatalité; juste de préférer vivre seul.e que s’empêcher de s’épanouir au nom d’une relation. On peut être célibattant pour de multiples raisons; avoir été sous emprise d’un.e partenaire et ne plus vouloir s’y retrouver, ne pas vouloir correspondre aux standards du couple, ou tout simplement ne pas penser à l’amour à deux, etc. Un.e célibattant.e peut connaître des relations intimes, mais tant qu’il/elle est célibattant.e, ces relations n’auront pas le cadre d’un couple. Si tant est qu’il/elle envisage de l’être un jour.

Elle a le mérite d’être claire! (Vidéo sur Facebook) Cet extrait vidéo dont je n’ai pas réussi à trouver la provenance est pour moi le cri de la célibataille: un grand Non aux sacrifices qu’impose les standards du couple et du mariage, une volonté de faire respecter ses choix de vie, et de préserver à tout prix son autonomie.

C’est un sujet d’autant plus intéressant concernant les femmes, car il n’y a pas si longtemps, celles qui n’étaient pas mariées ou au couvent étaient considérées comme des prostituées. L’engagement d’une célibattante femme suppose qu’elle n’a pas besoin de se mettre en couple pour trouver son équilibre, pour mener sa vie en toute responsabilité, pour tisser des liens constructifs, et surtout, pour vivre heureuse.

« Célibattante, la solitude assumée – 28 Minutes – ARTE »

Malheureusement, je constate que les chansons sur la célibattante ne sont pas terribles en général! On la dépeint comme une femme seule qui se consacre trop à son travail (“Célibattante” de Dick Rivers), ou se révèle être secrètement en quête d’un mari (“Célibattante” d'Olivier Béganger), ou se résout à la tristesse et cherche “le grand amour” (“Célibattante”, Chanson dont je n'ai pas trouvé l'interprète)… C’est déprimant! Ça manque de respect, de punch, de vitalité. La Célibataille est une bonne nouvelle: celle que la dignité n’a pas de prix, et qu’on peut s’aligner avec une vie pleinement consentie, sans avoir à se sur-adapter, se sacrifier ou changer pour qui que ce soit.

Comme le dit Pauline Clément dans « MOITIE.E.S : Célibattante » sur la chaîne Studio Bagel, « L’homme idéal, c’est quelqu’un de très absent »

Divinité associée: Diane, déesse archère de la chasse et des accouchements, protectrice des bêtes sauvages. Elle a fait voeu de chasteté.

 
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from Depuis les Gorces

Avril 2025, Marine Tondelier est super populaire et vient d’être largement réélue secrétaire nationale des écologistes. Est-ce que que ça annonce des matins verts ?

Se faire élire

Marine Tondelier est super populaire : les gens l’aiment bien, même hors des écologistes : elle est rassembleuse et non clivante. Elle passe bien dans les médias, sa veste verte est devenue une icône. Et pourtant, pour la prochaine présidentielle, les sondages créditent Marine Tondelier de quelques pourcents, 4 ou 5, peut-être à peine de quoi rembourser une campagne.

À l’inverse, Jean-Luc Mélenchon fait figure d’épouvantail même chez nombre de celleux qui croient en ses idées. Pourtant, c’est lui qui a fait le plus gros score à gauche de ces dernières années.

Je déteste infiniment Trump et ses amis fascistes. Ils sont clivants, ils sont adorés et détestés, et ils gagnent un peu partout.

J’ai envie de croire Sandrine Rousseau qui dit qu’il faut de la radicalité aujourd’hui pour être élu·e.

Pourtant, Sandrine Rousseau est très connue, elle fait des plateaux TV et des interviews radio, et elle clive comme personne… Mais au congrès des écologistes, son courant Radicalement Votre auquel j’appartiens n’a pas fait un bon score du tout.

Alors j’aimerais que Sandrine Rousseau ait raison, et que sa radicalité nous fasse gagner des élections. Pour le moment, je n’en sais rien.

Pour faire avancer les idées

Mais ce dont je suis convaincue, c’est que la radicalité nous permet d’avancer dans la bataille des idées.

Marine Tondelier dans les médias

J'ai pris conscience avec le congrès de certains reproches faits en interne à Marine Tondelier. Elle passe beaucoup à la TV ou à la radio, et c'est très bien, mais elle n'arrive pas à faire qu'on y parle d'écologie clairement. On lui reproche une ligne écologique très floue, un « Venez comme vous êtes » qui ne clarifie pas si l'on est pour ou contre le capitalisme, le nucléaire, les OGM, l'IA, les GAFAM, ...

Le débat sur l’aviation

L’aviation est un acquis, un privilège de classe sociale aisée qui ne veulent pas le reconnaître. Un droit au dépaysement, à l’aventure (normalisée) qu’il ne faut pas remettre en cause. Un grand nombre de cadres sup mangent bio, votent écolo, vont au travail en vélo, et partent à l’autre bout du monde en avion plusieurs fois par an.

Un jour, Jean-Marc Jancovici a dit sur France Inter qu’on devrait se limiter à 4 vols en avion dans toute une vie. Ça a fait le tour des médias, c’était ultra choquant apparemment. C’était une opinion radicale et clivante.

Depuis, la question de limiter le nombre de voyage par an est régulièrement discuté. J’ai l’impression qu’on a retenu comme acceptable pour un an ce que Jean-Marc Jancovici proposait pour une vie. C’est loin d’être suffisant, mais Jean-Marc Jancovici a fait tomber un tabou en proposant une mesure radicale.

D’autres positions radicales

J’ai rejoint le courant Radicalement Votre de Sandrine Rousseau chez les Ecologistes car on y défend des positions que les autres disent radicales. En tous cas, on y défend ce qu’on croit sans chercher à édulcorer pour le rendre acceptable pour les gens de droite ou d’extrême droite. On n’est pas dans le compromis avant même de débuter la négociation.

Ma radicalité

Voici quelques positions qui me parlent, je ne crois pas qu’elles soient toutes défendues chez Radicalement Votre, mais la plupart le sont.

  • Régularisons tous les sans-papiers, sans aucune condition. La France est une terre d’accueil, personne ne quitte son pays de gaîté de cœur, et la diversité est une force. J’aime entendre Harmonie Lecerf Meunier défendre cette position haut et fort.
  • Défendons le pouvoir de vivre, pas le pouvoir d’achat. L’objectif de notre société n’est pas que chacun·e puisse consommer, mais que chacun·e puisse vivre dignement. Dans cet esprit, défendons la sécurité sociale alimentaire qui permet à chacun de se nourrir convenablement quel que soit ses revenus. J’ai compris cette nuance entre pouvoir de vivre et pouvoir d’achat dans un discours de Sandrine Rousseau, et j’ai adoré.
  • Défendons une vraie diminution du temps de travail : 3 jours par semaine ?. Il nous faut du temps pour vivre, du temps pour cuisiner, pour cultiver notre jardin, pour aider les autres, pour bouiner et pour rêver. À quoi ça sert d’avoir optimisé tous nos process si c’est pour que nous soyons toustes stressé·es et en burn out à 35 ans ?
  • Refusons toute utilisation des intelligences artificielles génératives, celles qui permettent de piller le travail des illustrateurices et des auteurices, pour produire des illustrations qui se ressemblent toutes bourrées de clichés et d’erreurs, et des textes creux comme un discours de politicien politiquard.
  • Taxons les riches, interdisons les milliardaires. Nous avons besoin d’argent pour préparer le monde de demain, et nous devons le prendre là où il a été injustement accumulé.
  • Ne payons plus de licence microsoft sauf exception pour la fonction publique. Les logiciels libres permettent largement de faire 95% de notre travail numérique. Développons notre indépendance par rapport aux GAFAM, et un autre modèle de société.
  • Imposons des repas végétariens de qualité dans toutes les cantines et dans tous les évènements financés avec de l'argent public, et évidemment dans les évènements des écologistes.
 
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