Quitter Facebook et Instagram, c'est un peu comme prendre moins sa voiture. Beaucoup aimeraient le faire, mais beaucoup culpabilisent de ne pas y arriver.
La France compte environ 42 millions adultes de plus de 20 ans, 66 millions d'humains en tout, dont 30 millions sont sur Facebook. Près de la moitié des êtres humains vivant en France sont sur Facebook.
Qu'est-ce qui nous attire dans Facebook et Instagram ?
C’est compliqué de se passer de voiture dans un monde qui est pensé pour la voiture. Et de la même manière, c'est compliqué de se passer de ces réseaux pour trois raisons principales :
1. Tout le monde est sur Facebook, ou presque
Ma mère n'est pas geek du tout, mais elle a un compte Facebook et un compte WhatsApp. Mon frère est un geek snob ; il a un compte Facebook qu'il utilise peu, mais il en a un. J'ai résisté jusqu'en 2016, mais quand j'ai créé l'association Sciences Équines, j'ai créé un compte Facebook pour notre com'.
Tout le monde est sur Facebook, et parfois, Facebook (ou Instagram) nous apparaissent comme notre seul moyen de rester en contact avec certaines personnes, notre famille, proche ou éloignée, nos client·e ou nos électeurices, etc.
2. Il y a des infos que je ne trouve que sur Facebook
Ma mairie ne communique quasiment que par Facebook. L'éducatrice canine qui nous accompagne met régulièrement des infos uniquement sur Facebook. Le groupe féministe en libournais que je veux suivre ne communique que sur Instagram.
Il y a des infos que l'on trouve difficilement hors de Facebook.
3. C'est addictif, et ça bouche les trous
Sur Facebook et Instagram, je scrolle sans fin. La majorité des contenus ne m'intéressent pas beaucoup, mais des fois il y a une pépite. Alors je continue de scroller 10 minutes de plus. J'avoue que ça me donne l'impression de me reposer et de décompresser un peu. Et puis ça occupe mes minutes d'attente chez le médecin ou à la gare.
Facebook et Instagram nous servent à boucher les petits trous de notre emploi du temps. Ou à se distraire d'une tâche difficile.
Toujours plus de raisons de quitter Facebook
Ces temps-ci, je n'ai plus trop de discussions sur pourquoi quitter Facebook et Instagram. Tout le monde a au moins une bonne raison.
1. Ne pas soutenir Trump et ses petits copains
C'est LA raison récente de quitter ces réseaux. Ça fait quand même un peu plus mal chaque jour de se dire qu'on soutient des entreprises qui enrichissent des fascistes qui menacent notre pays.
Mais évidemment, ça n'est pas la seule raison !
2. Perdre moins de temps
Ces réseaux sociaux ont développé des stratégies sophistiquées pour qu'on y passe plusieurs heures par jour. C'est intéressant de regarder sur son téléphone combien de fois on a ouvert ces applis chaque jour, et combien de temps on y a passé. Moi ça m'a fait un peu peur et ça m'a motivé à commencer par mettre un minuteur pour ne pas y passer plus d'une demi heure par jour. Une demi heure sur Facebook, une demi heure sur Insta : ça va vite !
3. Voir moins de merdes
Ces réseaux sont en fait de géantes régies publicitaires. Le service est gratuit parce qu'avec toutes les données qu'on y laisse, Meta peut vendre des publicités ultra ciblées. Et avec les années, le fil d'actualités est devenu un fil publicitaire (de posts sponsorisés contre lesquels les bloqueurs de pubs ne peuvent rien) avec quelques posts d'humains au milieu.
Mais en plus de la pub, les algorithmes de ces réseaux favorisent le clash et les idées d'extrême-droite. C'est vraiment pas facile d'avoir un fil d'actualités qui soient reposant et bienveillant. L'information intéressante, celle pour laquelle on ouvre encore ces réseaux, est noyée dans un flot de merde. J'ai une copines qui m'a dit qu'elle a réussi à dresser l'algorithme, elles est trop forte !
4. Nous protéger
Ces réseaux stockent énormément de nos données, ils savent tout ou presque de nous. J'ai écouté récemment un podcast qui parlait d'une étude qui avait montré que les traces qu'on laisse sur internet permet d'en savoir plus sur nous que ce que nos proches savent 😱.
Avant on pouvait dire (et ça n'était pas très malin) : « Moi je n'ai rien à cacher, et je suis contente d'avoir des pubs ciblées ». Mais aujourd'hui ça n'est plus possible. Des données qui pouvaient sembler aussi anodines que la date où j'ai mes règles peuvent devenir des données sensibles. Des femmes aux États-Unis sont aujourd'hui menacées car ces données peuvent laisser penser qu'elles ont avorté. Et qui sait de quoi l'avenir est fait chez nous ? C'est dur d'être optimiste.
Est-ce que c'est possible de quitter Facebook et Instagram ?
Aujourd'hui, c'est difficile. Mais une fois qu'on a fait la liste de ce qui nous rend dépendant·e à ces réseaux, on peut commencer à agir, un pas après l'autre.
Voici quelques pistes pour diminuer progressivement notre dépendance à ces réseaux et pouvoir, un jour peut-être, s'en passer.
C’est super dur de mettre un pied hors de ces réseaux parce que tout se passe sur ces réseaux. La première action à mettre en place, c’est de rendre disponible ce que vous partagez sur ces réseaux hors de ces réseaux. De dupliquer l’information pour qu’elle soit accessible aux personnes qui ont fait le pas, ou qui essaient de quitter ces réseaux. Et on fait ça comment ?
1. Si vous publiez régulièrement : ouvrez un blog !
On peut avoir un blog, on peut avoir plusieurs blogs, comme dans les années 2010 ! Pour moi, la difficulté a été (est toujours) de m'autoriser à y poster des articles courts et un peu moins fouillés que ce dont j'avais l'habitude. J'ai appris les règles pour qu'un post soit bien référencé sur Google, mais en fait, là ce n'est pas (plus) l'objectif. Par exemple, je ne me force plus à trouver des images d'illustration.
En pratique, je continue à publier sur les réseaux sociaux (Mastodon et Linkedin). Et quand je trouve que c'est un contenu un poil intéressant, j'essaie d'en faire rapidement un petit post de blog.
J'avais quelques contacts avec qui je n'échangeais que par Facebook et Messenger. Je leur ai demandé une par une par quel autre canal on pouvait communiquer et maintenant, je n'ai plus personne qui me contacte par ce biais 💪. On est passées par le mail, les SMS ou WhatsApp.
Peut-être que certaines personnes vous répondront que c'est le seul endroit où elles veulent être. C'est OK. Cela n'empêche pas que chaque conversation que vous déplacez hors de Facebook diminue votre dépendance à ce réseau. Par exemple, j’ai installé Signal, mais je n’ai pas encore désinstallé les autres messageries.
3. Retrouver une communauté sur un forum, ou sur mastodon, ou même sur BlueSky
Une partie du plaisir de ces réseaux sociaux est / était l'échange avec des gens qui s'intéressent aux mêmes choses que nous. Mon conseil serait de goûter l'eau en dehors de Facebook. Essayer d'autres endroits. Ça prend du temps de s'intégrer dans une nouvelle communauté, donc il faut commencer bien avant de devoir (ou de décider) de fermer son compte sur Facebook et Instagram.
- Forum : Pour les copines cheval, je suis retournée sur notre bon vieux forum. Mais ça n'est pas le plus actif et le plus dynamique pour quelqu'un qui n'y aurait pas déjà passé du temps à son âge d'or il y a 5 ou 10 ans. Je crois que le forum jaune, equinéthique, est encore bien actif pour la communauté qui s'intéresse à l'équitation dite éthologique.
Mastodon : Pour les discussions sur tous les autres sujets, je n'avais jamais vraiment développé de relations sur Facebook. Pour moi tout se passait sur Twitter. J'ai quitté Twitter, et j'ai tout reconstruit sur Mastodon lors de la migration de 2022. Aujourd'hui j'y ai une vie sociale que je trouve très chouette !
Signal : Et les bavardages avec les copines et les militant·es se passent sur WhatsApp ou Signal.
Lien vers mon compte Mastodon
Avec Facebook, j'ai surtout perdu les infos locales. J'ai donc décidé d'acheter le Haute-Gironde une fois par mois. J’ai encore du mal à me motiver à le lire (je n’ai pas le réflexe de l’ouvrir, c’est encombrant par rapport à un téléphone), mais c’est là que j’ai découvert une conférence intéressante dans le village d’à côté.
Pour l'info non locale, ça fait plusieurs années que je suis abonnée à un média indépendant. Je tourne d'une année sur l'autre. J'ai commencé avec Arrêt sur images pendant plusieurs années, ensuite Le Monde, et en ce moment on est abonnés à Médiapart. J’ai aussi envie de soutenir Reporterre.
Pour les infos sur mes centres d'intérêt sur lesquels j'ai juste envie de lire, et pas de partager, j'ai deux canaux :
- Les blogs écrits par des vraies personnes que je lis via un aggrégateur de flux RSS. C'est une application sur mon téléphone (et sur mon ordi) qui fait le tour de tous les blogs que je suis, et qui récupère les nouveaux articles.
- Mastodon, sur lequel je suis quelques hashtags. Ce sont des mots clés que les gens mettent dans leurs messages, et moi, dès qu'il y a ces mots clés, ça apparait dans mon fil. Je trouve des recommandations de lecture sur #VendrediLecture, #JardinierDuDimanche pour des infos jardinage, #LesEcologistes et #Féminisme, pour des infos politiques, #vegan pour des nouvelles recettes, et #Bordeaux pour des infos locales.
5. S’éloigner des réseaux sociaux propriétaires
Quand on a commencé à dupliquer ses contenus ailleurs, quand on a commencé à goûter l’eau ailleurs, alors on peut commencer à s’éloigner doucement des outils numériques de la big tech.
Moi, j’y suis allée en plusieurs étapes :
- J’ai commencé par mettre un minuteur d’utilisation des applications pour limiter mon temps passé sur ces réseaux. J’ai progressivement baissé le temps que je m’autorisais sur facebook et linkedin pour augmenter celui dévoué à Mastodon.
- Puis j’ai désinstallé Facebook, Instagram et Linkedin de mon téléphone et je n’y accède plus que depuis mon ordinateur.
- J’ai coupé toutes les notifications de ces plateformes sur mon téléphone, et la plupart des notifications par mail (Je n’ai gardé que celles pour les messages privés)
- J’ai créé un compte Mastodon que j’ai utilisé pendant 2 ans sans retourner sur Twitter sauf pour récupérer des liens ou des photos que j’avais partagées. Puis j’ai téléchargé mes données, et j’ai fermé mon compte. Mais c’était 2 ans plus tard…
Et aujourd’hui je suis prête à fermer mes comptes Facebook et Instagram 🎉 !
Mais il n'y a pas que Facebook et instagram... Il y a aussi Whatsapp, Telegram, Messenger, Linkedin… Bref, affaire à suivre.
#QuitMeta